18 septembre 2008
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de Jonge Emmanuel, « Pertinence de l’utilisation du modèle de Toulmin dans l’analyse de corpus », Argumentation et analyse du discours, ID : 10.4000/aad.251
A travers cette réflexion, nous montrons comment le modèle de Toulmin, en tant qu’outil logico-argumentatif, peut aider à la description de mécanismes rhétoriques et argumentatifs opérant au sein du discours. Ce modèle permet en effet de mettre en avant la justification d’un argument et d’analyser comment celle-ci s’articule à son fondement, vu comme le cadre topique dans lequel cette justification s’inscrit. Nous examinons le cas particulier des Déclarations des droits de l’homme, exemplaire dans cette perspective d’analyse. Leur structure est divisée en trois catégories: préambule, proclamation, articles, qui correspondent à la structure du raisonnement argumentatif justification-conclusion. L’analyse de ce corpus permet, d’une part, de vérifier des hypothèses à propos de la topique des droits de l’homme et de son articulation au sein des discours, d’autre part de jeter les bases d’une méthode d’analyse toulminienne qui suppose la corrélation entre le fondement au sens technique que lui donne Toulmin et le fondement en tant qu’instance psycho-cognitive qui dépend de facteurs cognitifs tant que culturels. L’analyse montre en effet les différences de vision du monde qui peuvent être dégagées de la comparaison des schémas toulminiens. La présence du génocide et des actes barbares au sein de la justification de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 est centrale pour comprendre le renversementde perspective sur les droits de l’homme par rapport à la Déclaration de 1789. En 1789, les droits de l’homme étaient proclamés comme moyens d’accéder au bonheur ; alors qu’en 1948 ils sont une condition nécessaire de non-reproduction des actes barbares. Les conséquences pour les discours sont très importantes, puisque dans le premier cas, l’orateur va se positionner dans un cadre utopiste pour argumenter ; alors que dans le second l’expérience traumatique de la Seconde Guerre Mondiale constituera un anti-exemple dans lequel il faut puiser les moyens d’éviter la reproduction de l’événement. Nous utiliserons le terme de désenchantement pour qualifier cette disposition psycho-cognitive qui affecte toute la rhétorique. Au niveau des discours d’opposition, on constate une immixtion du génocide dans le politique, que ce soit dans les discours négationnistes, théories du complot, ou dans les discours sur l’esclavage, mettant en jeu une concurrence des victimes. La méthode d’analyse toulminienne permet cet éclairage, et établit ainsi un lien essentiel entre la rhétorique et l’analyse du discours.