16 avril 2020
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Alain Rabatel, « Appel à la pitié, questionnement problématologique et paradoxe pathémique », Argumentation et analyse du discours, ID : 10.4000/aad.4087
Cet article analyse des textes évoquant des conceptions religieuses basées sur une absence de pitié (et a fortiori d’appel à la pitié) envers des êtres humains ravalés au rang d’ennemis, tant dans la revue de DAECH, Dar al-Islam, que dans une correspondance de Voltaire relative aux châtiments que les catholiques infligèrent à la famille Sirven. Ces textes soulignent combien l’appel à la pitié gagne à être problématisé – ce qui sera fait ici selon une conception de l’argumentation comme argumentation indirecte – dans son contenu comme dans ses manifestations et ses analyses, car le lien entre religion(s) et compassion ou pitié ne va pas de soi. L’article interroge d’abord sur les raisons pour lesquelles il n’y a pas appel à la pitié, dans des conceptions intolérantes de la religion, avant de dégager les raisons positives de l’expression de la pitié, et, plus spécifiquement, du devoir de pitié. Il examine ensuite une mise en discours originale de l’appel à la pitié dans une lettre mi-privée, mi-publique de Voltaire relative à l’Affaire Sirven. Enfin, il esquisse une problématisation linguistique de la notion de questionnement problématologique de Michel Meyer (2017), dans la mesure où les stratégies discursives adoptées par Voltaire dévoilent un paradoxe pathémique, le texte étant d’autant plus émouvant qu’il comporte relativement peu de pathèmes, qu’il incite à l’action, dès lors que l’appel à la pitié suscite, outre l’apitoiement, un sentiment d’indignation face aux iniquités qui s’acharnent sur des victimes innocentes.