1 mars 2009
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Philippe Bourdin, « Mémoires d’ex-, mémoires d’exil : l’émigrante noblesse auvergnate », Annales historiques de la Révolution française, ID : 10.4000/ahrf.2307
Comme beaucoup d’autres, la noblesse auvergnate n’a pas utilisé une route unique de l’exil ; les liens culturels et affectifs, la discipline militaire ou tout au contraire le sauve-qui-peut l’ont dispersée principalement en Angleterre, en Allemagne, en Suisse ou en Espagne. Dans ce dernier pays se morfondra le marquis Chateauneuf-Randon d’Apchier : isolé dans une société qu’il trouve hostile, il subira à distance des déchirements familiaux irréversibles (exceptionnels, si l’on en juge par l’utilisation des divorces, destinés le plus fréquemment à sauver une propriété foncière ou à récupérer des biens mis sous séquestre) et mourra dans son exil. Le comte de Pontgibaud choisira au contraire de reconstruire sa vie et partie de sa fortune en se faisant colporteur et finira riche patricien à Trieste, sans conscience de déroger à des privilèges du reste abolis et sans volonté de retour. À Londres, Montlosier, monarchien convaincu, est en 1793 ostracisé par l’entourage du comte d’Artois. Avant l’Angleterre, il a cependant pu apprécier les forces de la Coalition d’Auvergne, alliance de plusieurs centaines de nobles auvergnats scellée à Fribourg deux ans plus tôt, à la faveur entre autres d’amitiés anciennes nouées par exemple à l’école royale militaire d’Effiat. Le comte d’Espinchal a combattu comme Montlosier à Valmy et, quoique monarchiste convaincu et émigré de 1789, nous laisse lui aussi des jugements critiques sur la capacité des princes à conduire la lutte, sur la reconstitution à l’étranger du milieu clos, superficiel et dispendieux de la cour versaillaise. Les hommes de la Coalition, qui se dispersent en 1793 et pour certains s’efforcent de rentrer clandestinement soit dans leurs départements d’origine soit en Vendée, gardant toutefois des liens avec Condé, demeurent un vivier pour la contre-révolution armée, très active à l’époque du Directoire : leurs filières finissent alors par s’enchevêtrer avec celles de l’évêque réfractaire du Puy-de-Dôme, François de Bonal, qui, de Suisse, organise la résistance des insermentés et un trafic de fausse monnaie. Cette rencontre favorise la mise sur pied d’un plan de soulèvement du Midi français, que le 18 Brumaire va faire avorter.