16 juillet 2015
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Marina Marietti, « L’amitié au ciel de Vénus (Paradis, VIII-IX) », Arzanà, ID : 10.4000/arzana.557
Au sein du diptyque consacré au ciel de Vénus (Pd VIII-IX) l’enjambement narratif entre les deux chants met en évidence l’épisode du prince angevin Charles Martel, fils aîné de Charles II d’Anjou, qui séjourna une vingtaine de jours à Florence en mars 1294, faisant ainsi la connaissance de Dante, et qui mourut l’année suivante. C’est là l’un des épisodes les plus longs de cette cantica ainsi que l’une des rencontres où le pèlerin-narrateur s’implique le plus, sur le plan autobiographique et doctrinal, dans un vrai dialogue. La mort précoce du jeune prince, qui a bouleversé la donne dans ses liens personnels (l’amitié pour le poète) comme dans ses liens publics (l’amitié pour les peuples), marque la partie narrative du sceau de l’irréel, afin de mettre en relief le contraste entre ce prince, juste mais « virtuel », et les rois injustes de sa dynastie : il y a une concordance parfaite entre Charles Martel et Dante personnage, mais aussi Dante auteur, plaçant l’échange entre les deux amis sous le signe de l’affection réciproque et d’une parfaite entente sur tous les plans (poétique, politique). Des croisements intertextuels contribuent à mettre en relation le ciel de Vénus avec la poésie courtoise, traçant un chemin qui mène de la passion amoureuse au salut. Sur cette voie, l’amitié véritable peut susciter, comme l’amour pur de la poésie occitane, une élévation de l’âme qui rapproche de Dieu : il y a passage de l’amour terrestre à l’amour céleste, dans la continuité et l’unicité de l’amour divin. La citation par Charles Martel de l’incipit de la chanson de Dante « Voi che ’ntendendo il terzo ciel movete », qui s’adresse directement aux Intelligences motrices du troisième ciel, associe étroitement l’ami et le bon monarque au mouvement qu’elles impriment au ciel de l’Amour, suggérant la philosophie du ciel de Vénus tout entier : l’amour humain est transmué par Dieu en Charité.