3 octobre 2020
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Silvia Sebastiani, « Temps, progrès et races dans les Lumières écossaises », Cahiers d’histoire. Revue d’histoire critique, ID : 10.4000/chrhc.14482
L’historiographie récente a identifié un point important : c’est avec les philosophes écossais – de David Hume, Adam Smith ou Adam Ferguson à Lord Kames, William Robertson ou John Millar – que s’est développée une nouvelle méthode historique, fondée sur l’idée de progrès. Ce que je souhaite montrer dans cet article est que la « race » est mobilisée par les philosophes écossais comme l’une des réponses aux questions ouvertes par une conception progressive de l’histoire. Les Écossais expliquent les différences observables entre les peuples à l’intérieur d’un schéma de développement universel, depuis « l’état sauvage » jusqu’à « l’état civilisé ». La perspective comparative permet d’examiner le « sauvage » et le « civilisé » comme étant sur le chemin d’une même histoire, mais à des moments différents. Cela signifie que le « sauvage » est susceptible de se civiliser à travers le processus historique. Cependant, le principe même de la comparaison pose d’emblée deux problèmes : celui de la distance sociale et culturelle entre les sociétés ; celui de leur progrès inégal. Pourquoi les Amérindiens sont-ils restés à l’état « sauvage » de la chasse ? Pourquoi seuls les peuples de l’Europe du Nord ont-ils franchi toutes les étapes du parcours historique ? Pour faire face à la question centrale du progrès non homogène des sociétés humaines, les Lumières écossaises déploient une analyse qui les conduit à théoriser la « race ».