5 juillet 2021
https://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/ , info:eu-repo/semantics/openAccess
Berny Sèbe, « ‘Showcasing Empire’ Past & Present Or A Brief History of Popular Imperialism, from Britannia to Brexit », Cahiers victoriens et édouardiens, ID : 10.4000/cve.9144
Peut-on établir un lien généalogique entre Britannia (au travers notamment de la chanson patriotique Rule Britannia composée par Thomas Arne en 1740) et le Brexit ? Bien que le concept de « Empire 2.0 » ait parfois été mis en avant parmi les raisons qui ont permis aux partisans du Brexit de rendre plausible le principe d’une sécession de l’Union européenne, les raisons sur le long terme susceptibles d’expliquer le choix de 52 % de la population britannique un jour de l’été 2016 ont souvent été négligées. Cela est d’autant plus surprenant qu’une approche du phénomène du Brexit sur la longue durée révèle des continuités saisissantes, étalées sur plusieurs siècles. Les progrès historiographiques depuis les années 1980, ont montré l’influence persistante de l’expérience coloniale sur l’ADN de la culture et des pratiques politiques au Royaume-Uni, reflétée en particulier par une large gamme de manifestations culturelles qui ont atteint de nombreux publics différents dans les îles britanniques — ce que John MacKenzie a nommé le « popular imperialism » (culture coloniale en français). Cet article explore l’hypothèse d’après laquelle cet attachement profond à l’empire a marqué la culture britannique à des degrés divers au moins depuis le dix-huitième siècle, et a trouvé un nouvel élan au sein des soutiens du Brexit, qui ont présenté de manière souvent implicite la force de l’héritage colonial, souvent présenté en tant que source de fierté, comme une option alternative au projet européen. Considérant l’évolution de la culture britannique sur les trois derniers siècles, cet article offre une perspective renouvelée sur les dynamiques à long terme ayant rendu possible ce qui semblait tout simplement impensable : que l’un des pays figurant parmi les plus ardents défenseurs de la coopération européenne et du marché commun dans l’après-guerre, décide un jour de tourner le dos aux idéaux qu’il avait si activement promus — par exemple, en tant que membre fondateur du Conseil de l’Europe.