5 avril 2019
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Geneviève Chevallier, « Samuel Beckett’s Theatre: from “things” to “The Thing” », Études britanniques contemporaines, ID : 10.4000/ebc.5962
On pense généralement la scène beckettienne comme une scène vide ou en train de le devenir. Il est vrai que les choses, que l’on identifiera provisoirement aux objets, qui l’occupent—et occupent du même coup les personnages—apparaissent comme des restes. Dernières possessions, tantôt bien réelles sur scène, tantôt déjà absentes, et seulement évoquées, invoquées, débris de sujet, ils sont ce qui reste pour que ce sujet ait pourtant encore la possibilité de se dire, pour que “quelque chose sui[ve] son cours”. C’est ce que l’on trouve dans toutes les premières pièces de Beckett, et dont l’exemple le plus “parlant” est peut-être Oh les beaux jours. Peu à peu pourtant, les objets sont tout à fait évacués, tandis que ce qui reste est une voix. Si elle est encore parfois associée à un objet—le magnétophone de La Dernière bande, le haut parleur de Quoi où—et semble alors encore faire fonction de personnage—la voix de la mère de May dans Pas, les voix du sujet démultiplié de La Dernière bande toujours, ou de Cette fois, celle décalée de la femme assise de Berceuse—la façon dont elle est associée à la bouche de Pas moi semble suggérer une toute autre dimension. Cette voix est une chose, qui se confond avec la bouche, avec la langue, à la fois organe et parole. Désormais ce ne sont plus les choses qui permettent de parler, mais la parole qui est La Chose même, passant dans ce féminin singulier à l’irreprésentable.