« Question noire » et mémoire de l’esclavage

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20 décembre 2016

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Michel Giraud, « « Question noire » et mémoire de l’esclavage », Cahiers d’études africaines, ID : 10.4000/etudesafricaines.16321


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Ce texte est une réaction contre la racialisation croissante des phénomènes sociaux qui est opérée aujourd’hui dans la société française en général et dans les sciences sociales en particulier. Une tendance dont l’émergence d’une « question noire » et d’un des principaux corollaires de celle-ci (au moins pour ce qui est des populations des départements d’Outre-mer), l’activation d’une mémoire de l’esclavage des «nègres», sont ici considérées comme un exemple des plus significatifs.Cette tendance se développe au risque que soient occultés ou, pour le moins, travestis les enjeux, les stratégies et les mécanismes proprement sociaux qui sont au fondement des discriminations racistes qu’affrontent effectivement les « Noirs » en France et que soient finalement brisées — sous le poids de la concurrence de victimes de l’histoire exigeant réparation — les solidarités transcommunautaires de diverses sortes qui, seules, peuvent enrayer ces discriminations et les dynamiques les déterminant.Elle a pour un de ses principaux moteurs des stratégies d’élites qui, toutes, consistent à constituer le racialisme en un moyen d’ascension sociale. Des stratégies dans lesquelles et pour lesquelles des groupes d’individus — convenablement dotés en capitaux de différentes sortes (économique, culturel et « racial ») — se révèlent donc particulièrement aptes à capter à leur seul profit les mobilisations identitaires ou mémorielles qu’ils ont souvent contribué à déclencher mais dont d’autres, moins bien dotés, forment la grande masse des fantassins.Concernant les populations des départements d’Outre-mer, les stratégies en question sont portées par des élites nationalistes ou indigénistes en mal de reconnaissance et renvoient à une même logique argumentative qui, sous couvert d’une dénonciation de l’aliénation coloniale (sous les espèces de « l’aveuglement à la couleur » ou de « l’oubli généralisé de l’esclavage »), est opposée à tous ceux qui, désireux de construire une citoyenneté française enfin « véritable », ne veulent pas se laisser enfermer dans « le piège de la race » ou dans celui d’une mémoire sacralisée du passé servile.

This paper is a reaction against the growing “racialization” of social issues occurring today in French society in general, and in the social sciences in particular. The emergence of a “black question” is one of the main corollaries of this trend (at least where populations in the French overseas departments is concerned). Here we consider that activating a memory of “negro” slavery it one of the most significant examples.The risk of this trend developing is that it may conceal (or at least misrepresent), the issues, strategies and purely social mechanisms that are the cornerstone of the racial discrimination to which “blacks” in France are subjected, and that the trans-community solidarity of various kinds that alone can curb these discriminations, and the dynamics that determine them, will collapse under the weight of the competing victims of history demanding reparation.Among the driving forces of this trend are the elite strategies that consist of making racism a means of social advancement. Using these strategies, groups of individuals — properly equipped with various kinds of capital (economic, cultural and “racial”) — appear to be particularly adept at seizing for themselves the benefits of the identity or memorial mobilisation that they themselves often helped trigger, away from the mass of less well equipped “footsoldiers”.Where populations in the French overseas departments are concerned, these strategies are promoted by the nationalist elite or indigénistes in need of recognition, and refer to the same argumentative logic that, under guise of denouncing colonial alienation (of the “colour blindness” or “the widespread forgetting of slavery” type) oppose all those who want to build a “true” French citizenship at last and do not want to be ensnared by the “race trap”, or a sanctified memory of a servile past.

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