7 décembre 2018
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André Mary, « Le « patient sorcier » », Cahiers d’études africaines, ID : 10.4000/etudesafricaines.22294
Le montage médiatique des affaires de « crimes rituels » en Afrique équatoriale nous semble justifier quelque retour à l’approche durkheimienne de la responsabilité qui ne manque pas de pertinence sur le plan de la description phénoménologique. L’approche « objective » des situations génératrices de responsabilité dont Fauconnet s’est fait le porte-parole rompt avec les présupposés d’une compréhension fondée sur le principe d’un sujet conscient, libre et responsable au sens moderne du terme. Mais la pertinence de cette approche « archaïque » de la criminalité « objective » qui renoue avec le registre de la sacralité impure de l’acte et de la souillure du criminel ne peut être restreinte à la compréhension des ordalies des sociétés primitives qui inspirent la théorie de la participation de Lévy-Brühl. Les affaires contemporaines de « crimes rituels » et de « sorcellerie politique » en Afrique ou ailleurs témoignent de mécanismes sociaux d’accusation toujours actifs et générateurs d’une « responsabilité objective » encourageant la présomption et même la conviction de culpabilité au cœur de la justice médiatique moderne, ce qui n’empêche nullement la confrontation entre les logiques judiciaires de la preuve et les témoignages des sujets « pris dedans » souvent malgré eux dans ces affaires.