23 avril 2020
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Marjorie Colin, « Poétique du corps en souffrance dans le théâtre de Beckett », Les Chantiers de la Création, ID : 10.4000/lcc.3596
Le corps des figures beckettiennes est un corps empêché, handicapé, fragmenté. Cette fascination du dramaturge pour la faillite physique témoigne d'abord du registre tragique : soumis à la fatalité d'un corps qui fait défaut, les personnages se retrouvent prisonniers, ramenés sans cesse à leurs impossibilités et dans une certaine mesure, ils peuvent être associés à la figure du pantin. Animalisés voire réifiés, ils semblent être des résidus d'humains. Pourtant, leurs impotences peuvent se colorer plus positivement. Par leurs jeux maladroits et leurs perpétuels échecs, ils peuvent s'apparenter aux clowns dont le corps est le principal levier du comique. En effet, les dérèglements auxquels leurs corps sont soumis viennent générer une profonde hilarité par les décalages avec la norme qu'ils induisent. De fait, si Beckett pratique une poétique du corps minoré, ce n'est que pour mieux rendre compte de la puissance vitale des personnages qui même couchés, résistent à l'anéantissement.