8 octobre 2014
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Claudine Delacroix-Besnier, « Lectures de Photios du concile de Trente à Vatican II », Mélanges de l’École française de Rome - Italie et Méditerranée modernes et contemporaines, ID : 10.4000/mefrim.608
« Lectures de Photios » est un bilan historiographique de la question du schisme grec dans l’édition française principalement. Le schisme grec est, certes, une question religieuse mais les différentes phases de sa genèse comme l’appréciation qui en a été faite par les différents partis sont étroitement liées à la conjoncture tant politique que culturelle. Ainsi la responsabilité du schisme en a-t-elle été imputée très longtemps au patriarche Photios qui gouverna l’Église grecque pendant la seconde moitié du ixe siècle. Depuis les années 30 du xxe siècle, celle-ci s’est déplacée vers Michel Cérulaire qui défia la papauté au milieu du xie siècle. Ce bilan a donc pour objectif de comprendre les raisons de ce changement. Chemin faisant, il s’avère que la question du schisme grec a été souvent instrumentalisée lors des conflits religieux de l’époque moderne, les protestants ayant tenté de démontrer que l’Église grecque avait raison de rejeter la primauté romaine. Catholiques, protestants comme jansénistes et gallicans prirent donc à témoin les positions doctrinales et ecclésiologiques de l’Église grecque, chaque parti cherchant à montrer qu’il avait raison. L’histoire de l’Église orthodoxe a donc été beaucoup revisitée par l’historiographie française, plus particulièrement au cours des xviie et xixe siècles. Les Lumières du xviiie siècle avaient contribué à apaiser les conflits religieux. L’intérêt pour l’histoire de l’Église orthodoxe a été renforcé, au cours du xixe siècle, par le courant orientaliste qui accompagna les conflits dus à l’affaiblissement de l’empire ottoman et la politique extérieure de Napoléon III. La restauration du pouvoir pontifical a également permis une reprise des missions catholiques en Orient et les frères assomptionnistes en furent des acteurs importants. Leur action, tant apostolique qu’intellectuelle, conduisit au xxe siècle à une écoute plus attentive des communautés chrétiennes d’Orient et permit l’émergence, dans l’Église romaine, d’un puissant courant œcuménique. Dans cette conjoncture, une révision drastique de la question du schisme, appuyée sur de nombreuses éditions critiques de sources, conduisit à mettre l’accent, dans les années 30, sur la responsabilité de Michel Cérulaire. Le schisme fut désormais perçu comme une rupture moins doctrinale, plus politique et juridique, et, ainsi, moins difficile à surmonter. Cette nouvelle lecture du schisme dans le cadre du courant œcuménique conduisit les pères du concile de Vatican II à négocier une union entre le pape et les patriarcats orientaux, du moins ceux qui s’étaient déjà rapprochés de Rome depuis le concile de Florence (1439) et le synode de Brest-Litovsk (1595).