13 octobre 2020
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Sophie Moirand, « Retour sur l’analyse du discours française », Pratiques, ID : 10.4000/pratiques.8721
Mon point de vue sur l’analyse du discours dite « française » (ADF) s’articule autour d’une conviction forte, à savoir que toute réflexion sur le(s) discours découle d’une série d’interrogations sur « le sens » : sens des mots et des constructions syntaxiques, sens des énoncés et usages de la langue en rapport avec les conditions de production, sens des propos tenus par les acteurs sociaux, ou encore réflexion sur le « sens social » des dires d’une époque, qui s’inscrirait dans l’histoire des idées d’une société à un moment de son histoire. Ainsi l’ADF, née dans la décennie 1960-1970, est centrée à ses débuts sur l’analyse du discours politique et des discours institutionnels (partis, syndicats, etc.). Mais, autour des années 1980, certains travaux se préoccupent davantage du comportement langagier des groupes sociaux et des communautés multilingues, des paroles d’ouvrières et d’ouvriers, etc., glissement qui s’explique également par la découverte, en France, des travaux de sociolinguistique, interactionnelle ou variationniste, nord-américains.Changements de terrain, changements de points de vue, changements de corpus conduisent à revenir aux deux piliers de l’ADF : les opérations d’énonciation (qui parle et à qui), déjà largement étudiées, mais surtout les opérations de référenciation. On se demande alors quels que soient le terrain et les corpus recueillis, « comment les activités humaines, cognitives et linguistiques, structurent le monde, et lui donnent du sens » ; le contexte n’est plus un cadre fixé en préalable au recueil de données, il est en perpétuelle évolution selon les ressources des locuteurs et la mobilisation des référents : et cela explique l’instabilité du sens des mots et des énoncés.C’est cette conception évolutive du contexte que les chercheurs tentent de décrire dans leurs analyses, ainsi que son influence sur ce qu’on dit et comment on le dit aux différents niveaux de la production discursive. On tente ici de l’expliciter à travers de nombreuses références à des travaux publiés depuis plus de quarante-cinq ans.