1 avril 2014
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Mathilde Grodet, « Le secret de Mélusine dans les romans français et l’iconographie aux XIVe et XVe siècles », Questes, ID : 10.4000/questes.840
Le secret de Mélusine répond à des raisons à la fois religieuses (acquérir une âme) et amoureuses. Les artistes font face à un paradoxe : comment dire ce que l’on tait et montrer ce que l’on cache, tout en soulignant qu’on le tait et qu’on le cache ? Les récits mettent l’accent sur l’interdit, sur le mystère que garde Mélusine, sur l’ignorance de Raymondin (où vient buter la transparence qu’il affiche), et sur la rumeur autour de la nature de la fée. Le secret, tant qu’il demeure dans le cadre privé, continue d’exister, mais ne résiste pas à plus de publicité : il est moins lié à son contenu qu’à son aire de diffusion. Les miniatures en rendent l’idée, dans la scène du bain épié, à travers la bipartition de l’espace, son enchâssement, et le jeu des regards, qui montrent que Mélusine se cache. Le passage du secret du privé au public est parfois annoncé par les gestes et les regards de Raymondin. Dans la scène d’accusation publique, l’émotion est privilégiée, à travers l’évanouissement : soit les personnages sont séparés, et leur opposition met en relief la culpabilité de Raymondin, soit ils sont encore unis, mais inconscients. À la fois contrainte et preuve d’amour, le respect du secret était, dès le départ, le lien qui unissait le couple.