16 décembre 2016
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Thierry Bonnot, « Archéo-anthropologie des restes de l’industrie », Techniques & culture, ID : 10.4000/tc.8160
Les enquêtes sur les objets matériels et leur rôle dans le monde social visent des choses qui, selon leur durabilité physique et l’intérêt qu’elles peuvent susciter chez des individus ou dans certains groupes sociaux (institutions, communautés, familles…), traversent les années en demeurant matériellement identifiables malgré l’usure. S’intéresser à des objets devenus déchets nous permet de saisir un continuum qui transcende les catégories ordinaires. À la lisière entre ce qui a été délibérément éliminé et ce qui a été simplement ignoré, une zone floue et indécise subsiste, faite de circulation entre des catégories bien distinguées par le sens commun. Mes récentes enquêtes de terrain m’ont fourni deux cas de figure mettant en jeu cette fluidité des statuts des restes du passé. Sur un territoire anciennement industrialisé où subsistent des reliquats mobiliers et immobiliers de l’activité productive, j’ai mené un chantier archéologique dans un dépotoir d’usine céramique. J’ai ensuite entamé un travail sur l’héritage d’un site industriel par une famille qui ne sait pas comment le gérer. Les restes industriels constituent une matérialité opaque, mêlée de souvenirs intimes, d’archives croisant l’histoire industrielle et celle de la famille. Ce contexte nous amène à réfléchir à ce qu’est un héritage légué implicitement, un déchet non éliminé.