6 décembre 2020
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Camille Debras, « Espaces fictionnels, espaces interactionnels : approches linguistiques des séries », TV/Series, ID : 10.4000/tvseries.4462
Les séries plaisent-elles parce que les personnages parlent comme le spectateur, reflétant ainsi son univers ? Cet article propose un tour d’horizon des approches linguistiques des séries, autour de la notion centrale d’espace. Deux approches se sont particulièrement saisies des séries, la linguistique de corpus et la linguistique interactionnelle, autour de trois enjeux centraux : la représentation du réel, la définition des personnages et l’interaction avec le spectateur. À partir d’analyses semi-automatisées de transcriptions des dialogues des séries, la linguistique de corpus en caractérise le genre discursif. La linguistique interactionnelle théorise l’enchâssement des deux espaces d’interaction mis en jeu : l’interaction réelle entre le spectateur et la série, qui se construit par le biais de l’interaction fictionnelle entre les personnages.Comme le montrent Quaglio et Bednarek, le genre discursif de la série est plus informel, plus émotionnel, moins vague, et moins narratif que la conversation spontanée. La stabilité langagière des personnages au fil des saisons est centrale pour construire la stabilité de l’univers fictionnel. Les pratiques langagières et sémiotiques des personnages mettent en jeu les attentes et les cadres interprétatifs socioculturels du spectateur pour construire des types.L’espace interactionnel spectateur-fiction a donné lieu à de multiples théorisations ; le modèle d’interaction screen-to-face proposé par Bubel est le plus abouti. Celui-ci intègre les notions de participation framework proposée par Goffman et Clark, celle de recipient design proposée par Sacks et ses collègues, ainsi que les travaux anthropologiques de Duranti sur le rôle actif du spectateur. Toolan montre que l’opacité linguistique dans une série comme The Wire est sa force, car la série joue sur le dispositif d’interaction screen-to-face, en positionnant un spectateur en proie à de constantes difficultés de compréhension aux côtés de personnages qui ne cessent de s’épier.