9 décembre 2015
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Ophir Lévy, « Projectiles : De l’usage du plan-séquence dans The West Wing », TV/Series, ID : 10.4000/tvseries.693
La série The West Wing se caractérise notamment par ses longs plans-séquences virtuoses au sein desquels les personnages sillonnent l’aile ouest de la Maison-Blanche. Figures de la continuité par excellence, ces plans déplient méthodiquement un territoire où règne en permanence une activité frénétique qui se donne sous la forme de multiples trajectoires. Trajectoires croisées des corps anonymes appartenant à une foule de figurants de passage (assistants, secrétaires, stagiaires) qui, en moins d’une seconde, tels des projectiles, traversent l’écran et disparaissent absorbés par leur tâche. Trajectoires continues des principaux collaborateurs du président, ou du président lui-même, soutenues par des dialogues incessants qui semblent constituer le carburant de leur motricité même. Trajectoires en rafale des mots eux-mêmes, qui fusent à leur tour tels des projectiles au service d’une extraordinaire balistique de la parole. Que suggère cette coextensivité de la marche et de la parole dans The West Wing ? Soulignant la dépense continue et la virtuosité des personnages, l’ivresse du langage ou au contraire sa plus haute performativité, les plans-séquences permettent de rendre sensible la dimension éminemment physique de la parole. Et sans doute ménagent-ils, à leur manière, un accès à l’essence même du politique, la parole se manifestant dans la série en tant qu’elle est action véritable (convaincre, légiférer, gouverner) et non simplement verbiage inconsistant.