19 mai 2014
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Orly Toren, « Aharon Appelfeld et Philip Roth : le réel, l’imaginaire, le double et le fantastique », Yod, ID : 10.4000/yod.2028
C’est la marge étroite entre « le réel et l’imaginaire » selon le titre de l’essai de Masha Itzhaki sur Appelfeld que nous souhaiterions explorer à partir de la relation entre Le Temps des prodiges d’Appelfeld et Opération Shylock de Philip Roth. Si la vrai/fausse « confession » de Roth se présente comme le détournement vertigineux des codes du fantastique, de l’autobiographie et de l’autofiction, le roman d’Appelfeld pousse les limites du réalisme par l’interrogation que suscite son titre énigmatique qui renvoie au surnaturel. Œuvre qui évoque la Shoah sans la représenter, le roman d’Appelfeld correspond à ce que Sartre a défini comme une « littérature des situations extrêmes ». Néanmoins, par son titre et la page blanche qui sépare ses deux parties et renvoie à l’« indicible » de la Shoah, ne sollicite-t-elle pas aussi le fantastique qui, selon Todorov, n’est pas nécessairement une configuration imaginaire, mais plutôt « l’hésitation éprouvée par un être qui ne connaît que les lois naturelles, face à un événement en apparence surnaturel » ? Philip Roth, critique littéraire tout autant qu’écrivain, n’a t-il pas bien cerné cette dualité en créant dans Opération Shylock un Appelfeld fictionnel, le « double » bienveillant de son homonyme réel aux côtés d’un Roth affublé d’un « double maléfique », indiquant ainsi qu’Appelfeld transcende l’événementiel qui lui a valu injustement le titre réducteur d’« auteur de la Shoah » ?