2011
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Cinémas : Revue d'études cinématographiques ; vol. 21 no. 2-3 (2011)
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Jacques Aumont, « L’histoire du cinéma n’existe pas », Cinémas: Revue d'études cinématographiques / Cinémas: Journal of Film Studies, ID : 10.7202/1005588ar
En énonçant que « l’histoire du cinéma n’existe pas », on n’entend ni dénier ni dénigrer l’important travail accompli depuis plusieurs décennies par des historiens. On peut toujours soupçonner l’histoire de n’être pas assez bien faite, mais dans le texte qui suit, c’est sur « cinéma » que portera le soupçon. Ce mot, en effet, désigne un objet hétérogène (et même, plusieurs objets) : de la pratique privée à la pratique spectaculaire, des industries (celle des appareils, celle des films, fort différentes) aux commerces. Dans tous les cas, les difficultés sont de deux ordres : d’une part, le cinéma a toujours été, même lâchement, rattaché à l’art ; or, l’histoire de l’art ne saurait offrir un modèle incontestable, loin de là, car elle est surtout remarquable par ses apories. D’autre part, et plus essentiellement, le cinéma consiste en images, dont la variété est infinie et qui se manifestent comme présence à un sujet humain : ni de cette variété, ni de ces phénomènes subjectifs, il n’est réellement possible de faire l’histoire. L’historien du cinéma doit donc déterminer la pertinence de son travail tout en ayant à l’esprit ces difficultés.