Gouverner par des « coups de pouce » (nudges) : instrumentaliser nos biais cognitifs au lieu de légiférer ?

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2018

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Les Cahiers de droit ; vol. 59 no. 1 (2018)

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Alexandre Flückiger, « Gouverner par des « coups de pouce » (nudges) : instrumentaliser nos biais cognitifs au lieu de légiférer ? », Les Cahiers de droit, ID : 10.7202/1043690ar


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En visant la partie inconsciente et émotionnelle de notre esprit, les sciences affectives et comportementales ont démontré la possibilité d’orienter nos actions sans recourir à la contrainte. Dans ces conditions, la tentation était vive de chercher à exploiter les résultats de telles recherches pour gouverner nos conduites au lieu de légiférer. Par d’habiles « coups de pouce » (nudges), l’État devient ainsi l’architecte de nos choix (choice architect), chargé de créer un environnement incitant, à notre insu, à obéir comme il le souhaite. En d’autres termes, donner un « coup de pouce » revient à créer un environnement comportemental incitateur (choice architecture) offrant un contexte propice à l’adoption d’un comportement déterminé sans contrainte apparente.Un tel mécanisme présente l’indéniable intérêt de contribuer à mettre en oeuvre les lois et les politiques publiques de manière plus souple. L’incitation doit en effet être préférée à la coercition si la première se révèle suffisamment efficace. Pourtant, la création d’environnements comportementaux incitateurs est un moyen possiblement très intrusif, susceptible de court-circuiter notre libre arbitre. Il reviendra donc aux autorités de ne retenir que ceux d’entre eux dont la nature n’est pas manipulatoire. Fondés sur une base légale, visant un intérêt public, proportionnés, conformes à la bonne foi, transparents et non discriminatoires, ces environnements ont en revanche toute leur place dans la panoplie d’un État de droit.

By focusing on the unconscious and emotional part of our minds, the affective and behavioural sciences have revealed a way of orienting our actions without resorting to coercion. It is therefore tempting for governments to exploit the results of such research to steer our conduct using psychology instead of legislation. By skilful “nudges”, the government becomes the “choice architect” in charge of creating an environment inciting obedience. In other words, nudging is the creation of a behavioural environment (choice architecture) that provides a context conducive to the adoption of a determined behaviour without apparent constraint.Such a mechanism assists in implementing laws and public policies in a more flexible way. In fact, persuasion must be preferred to coercion if the former proves to be sufficiently effective. Yet, the creation of conducive behavioural environments is potentially very intrusive and likely to bypass our free will. It is therefore up to the authorities to retain only the environments that are not manipulative in nature. Provided with a legal basis, targeting a public interest, proportionate, consonant with good faith, transparent and non-discriminatory, they have their full place in a democratic constitutional state.

Las ciencias afectivas y conductuales han demostrado la posibilidad de orientar nuestras acciones sin recurrir a la coacción, al enfocarse en la parte inconsciente y emocional de nuestra mente.  En estas condiciones, era grande la tentación para explotar los resultados de tales investigaciones, a fin de controlar nuestras conductas en lugar de legislar.  Con hábiles « empujones » (nudges) el Estado se convierte así en el arquitecto de nuestras opciones (choice architect) encargado de implantar un entorno estimulante, sin que lo sepamos, para que obedezcamos, tal y como el Estado anhela. En otras palabras, dar « un empujón » quiere decir crear un entorno conductual incitador (choice architecture) ofreciendo de esta manera  un contexto propicio para la adopción de un comportamiento determinado, sin coacción aparente.Un mecanismo de esta índole representa el innegable interés de contribuir en la implementación de leyes y políticas públicas de manera más flexible.  Efectivamente, se debe preferir la incitación que la coerción, si la primera resulta ser lo suficientemente eficaz.  Sin embargo, la creación de entornos comportamentales incitadores es posiblemente un medio muy intrusivo, susceptible de causar un corto circuito en nuestro libre albedrío. Le corresponde entonces a las autoridades retener a aquellos que son de naturaleza no manipuladora,  con un fundamento jurídico, de interés público, que guardan proporción, conformes con la buena fe, transparentes y no discriminatorios, de esta manera, pueden ocupar cabalmente su lugar en un Estado de derecho.

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