2018
Tous droits réservés © Les Presses de l’Université de Montréal, 2018
Martin Hervé, « La proie ouverte en son ombre : Blesse, ronce noire de Claude Louis-Combet », Études françaises, ID : 10.7202/1050585ar
Dans Blesse, ronce noire (Paris, José Corti, 1995), Claude Louis-Combet se consacre à la vie imaginaire et érotique du poète Georg Trakl et de sa soeur Margarethe. Leur drame incestueux repose sur un fantasme d’union et de complétude qui articule tout un théâtre d’images troubles, si ce n’est doubles, du masculin et du féminin. Drame qui doit en passer par un scénario cynégétique pour que le frère et la soeur, le chasseur et sa proie, investissent la scène de la rencontre des corps. Celle-ci aura été autant désirée que retardée, mise à distance par ces images dans lesquelles les amants préfèrent se contempler et se leurrer plutôt que d’ouvrir les yeux, c’est-à-dire de faire face à l’impossible de leur rêve du comme un. Aussi l’acte sexuel sonne, non l’hallali de la jouissance, mais la curée funeste du désir. À l’impossible de la coïncidence des sexes, les amants Trakl n’opposent que le déni d’un jeu d’ombres.