2016
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TTR : Traduction, terminologie, rédaction ; vol. 29 no. 1 (2016)
Tous droits réservés © Pierre-AlexisMével et Dawn M.Cornelio, 2018
Pierre-Alexis Mével et al., « Collision and Collusion: Contrasting Representations of the Translator-Author Relationship in Two Contemporary Francophone Novels », TTR: Traduction, terminologie, rédaction, ID : 10.7202/1050711ar
Cet article se concentre sur les représentations à première vue contradictoires du rôle du traducteur et de la traduction, et sur l’utilisation contrastive de métaphores et de métadiscours sur la traduction dans Vengeance du traducteur (2009) de Brice Matthieussent et La Traduction est une histoire d’amour (2006) de Jacques Poulin. Le roman de Matthieussent constitue bien une vengeance, une prouesse post-moderne dans laquelle les notions mêmes de texte original et de traduction, de texte source et cible, d’auteur et de traducteur, fusionnent au point de perdre toute forme de pertinence opérationnelle. Au passage, ce roman redéfinit les concepts de fidélité et de créativité et redessine les espaces culturels et typographiques. Présenté comme une traduction par son narrateur, Vengeance du traducteur est avant tout une réflexion sur la traduction, une déconstruction métaphorique et symbolique de la relation auteur-traducteur, qui dissèque les relations de pouvoir qui émergent du processus traductionnel, et qui va jusqu’à remettre en question la validité des notions d’auteur et de traducteur en en révélant toute l’absurdité. Le roman de Poulin appréhende la relation auteur-traducteur de manière plus traditionnelle ; il met en scène le personnage de Marine, qui narre l’action à la première personne et qui souhaite rencontrer un auteur qu’elle admire dans le but de devenir sa traductrice. Bien qu’elle arrive à ses fins, rares sont les scènes qui se focalisent sur la traduction elle-même ; à la place, l’auteur et sa traductrice doivent, grâce à un message cryptique attaché sur son collier, retrouver le propriétaire d’un chaton abandonné. Ils vont non seulement retrouver les mots manquants, effacés de l’indice, mais aussi leur donner un sens. Ce partenariat symbiotique, hors du cadre de leur travail, devient une métaphore du processus traductionnel : c’est cela qui met paradoxalement l’accent sur le travail de traducteur, relégué au second plan en dépit d’un titre qui en promet la centralité. Grâce à une analyse détaillée des deux romans, nous démontrons comment la mise en abîme de la traduction précise et subvertit la perception et la pratique de la traduction littéraire.