2017
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L'Actualité économique ; vol. 93 no. 3 (2017)
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Julien Martin et al., « Fiscalité des entreprises et paradis fiscaux : une étude sur données canadiennes », L'Actualité économique, ID : 10.7202/1058427ar
Le recours à l’évitement fiscal est un phénomène largement documenté dans la littérature économique et comptable, quoique peu d’études traitent de l’évitement fiscal des multinationales canadiennes. Cet article dresse un portrait de l’évolution de l’imposition des entreprises canadiennes et de leur recours aux paradis fiscaux. Une évaluation des pertes associées au recours aux paradis fiscaux est proposée.Les multinationales utilisent différentes méthodes pour réduire, voire se soustraire à la fiscalité. Elles peuvent, entre autres, déplacer leur endettement vers des pays à taux d’imposition élevés.Elles peuvent aussi ajuster les prix de transferts, qui sont les prix imputés dans les transactions avec leurs filiales étrangères, de manière à transférer des profits vers des pays où le système de taxation est plus avantageux. Enfin, les multinationales ont également la possibilité de délocaliser leurs activités en faveur des juridictions à faible imposition.La littérature suggère que les entreprises canadiennes entretiennent des relations étroites avec les juridictions à faible imposition. Collins et Shackelford (1995) ont calculé que les entreprises canadiennes ont un taux d’imposition effectif inférieur à celui des États-Unis, du Japon et du Royaume-Uni. Arnold et Wilson (2014) montrent que les autorités du Canada sont réticentes à l’idée d’adopter des mesures restrictives afin de ne pas désavantager les entreprises canadiennes vis-à-vis de ses concurrents internationaux. Hejazi (2007) met en évidence l’importance croissante des paradis fiscaux dans les investissements directs canadiens à l’étranger. Mintz et Smart (2004) montrent que les entreprises canadiennes procèdent à l’évitement fiscal entre les provinces en transférant leurs bénéfices vers des provinces ou des territoires à faible fiscalité.Différentes sources de données microéconomiques et macroéconomiques sont mobilisées. Il ressort de cette étude que le taux d’imposition effectif des entreprises canadiennes se situe largement en deçà du taux d’imposition statutaire et qu’il n’a cessé de décroître au cours des 35 dernières années. La tendance baissière du taux d’imposition s’observe pour les petites et pour les grandes entreprises. Cependant, les niveaux et l’évolution des taux d’imposition effectifs sont assez hétérogènes entre secteurs d’activité. Les données montrent ensuite que la part des bénéfices générés à l’étranger par les entreprises canadiennes a plus que doublé au cours des 30 dernières années. Par ailleurs, les paradis fiscaux abritent environ 25 % des investissements canadiens à l’étranger.