2017
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Revue de droit de l'Université de Sherbrooke ; vol. 47 no. 2-3 (2017)
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Érik Labelle Eastaugh, « LA JURILINGUISTIQUE ET L’ÉGALITÉ : LES DROITS LINGUISTIQUES EN TANT QU’ACCORDS INCOMPLÈTEMENT THÉORISÉS », Revue de droit de l'Université de Sherbrooke, ID : 10.7202/1065184ar
Par l’entremise de l’interprétation des lois bilingues, la jurilinguistique permet aux tribunaux de mieux protéger l’égalité des communautés de langue officielle lorsque celle-ci fait l’objet d’une garantie législative ou constitutionnelle particulière. De telles garanties traduisent souvent ce que le constitutionnaliste américain Cass R. Sunstein appelle un « accord incomplètement théorisé », en ce sens qu’elles énoncent une norme juridique dont le constituant n’aurait pas fixé à l’avance toutes les implications conceptuelles et pratiques. Or, l’existence de deux versions du même texte législatif ou constitutionnel offre un champ sémantique plus riche permettant d’apporter des nuances additionnelles qui peuvent, par la suite, aider à déterminer la conception de l’égalité la mieux adaptée à l’objet de la garantie et aux circonstances du cas d’espèce. L’importance d’une telle richesse sémantique est particulièrement bien illustrée par l’arrêt Mahe c. Alberta de la Cour suprême du Canada, décision charnière eu égard au principe d’égalité en matière de droits linguistiques, dans laquelle l’interprétation des lois bilingues a joué un rôle déterminant. Dans cette optique, l’auteur du présent article effectue un examen approfondi de l’arrêt Mahe dans le but notamment de souligner l’utilité d’une démarche qui voit dans l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés l’expression d’un accord incomplètement théorisé.