Buongiorno, notte : « approfondir l'histoire par infidélité »

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Au sein du corpus des films où apparaissent les groupes révolutionnaires armés des années Soixante-dix en Italie, Buongiorno, notte, de Marco Bellocchio (2003), fait figure d’exception. Le réalisateur choisit en effet de faire un film sur l’un des moments les plus dramatiques et les plus emblématiques de l’histoire des années de plomb, mais, contrairement à d’autres, il choisit de le faire sans recourir à la spectacularisation de la violence, ni aux intrigues des théories du complot, se concentrant sur un huis-clos, au plus près de l’intimité de son personnage principal, Chiara, et de son rapport mi-réel mi-imaginaire à la personne du prisonnier Aldo Moro. Cependant, c’est à travers ce choix de la reconstruction d’une subjectivité, voire même de l’infidélité à certains faits réels, que Bellocchio réussira ce qu’aucun film n’avait fait avant celui-ci, c’est-à-dire s’approcher des causes historiques, plus ou moins lointaines (communisme, drames du fascisme et survivances d’une résistance « trahie »), qui peuvent expliquer la naissance du phénomène de la lutte armée en Italie. L’un des procédés formels qui illustre le mieux cette démarche est celui de la citation, ou de l’insertion d’images empruntées à d’autres films, dont sont composées les rêveries de Chiara. Notre article se propose d’analyser les séquences où apparaissent ces emprunts, pour mieux dégager le sens politique du film, entre évocations du passé et vision présente, nécessairement rétrospective.

Among the films that portray political violence and the extremist revolutionary groups of the Italian Seventies, Buongiorno, notte, by Marco Bellocchio (2003) stands out. The director chooses to make a film about one of the most dramatic and emblematic period of the decade known as “ anni di piombo” (years of lead), but, unlike other directors, he does so without resorting to spectacular violence or conspiracy theories. The film actually focuses on a huis-clos, and follows the very intimacy of its protagonist, Chiara, and her half real/half imaginary relationship to her prisoner Aldo Moro. However, it’s through this reconstruction of subjectivity, and even infidelity to historical facts, that Bellocchio succeeds in doing what no film had done before : approaching the historical causes that can explain the birth of political violence in Italy (communism, the tragedies of fascism, and survival of a « betrayed » resistance). One of the formal processes that best exemplifies this approach is the quotation, or the insertions of images from other films, which represent Chiara’s dreams and daydreams. This article intends to analyze the sequences in which these heterogeneous images appear, in order to make out the political sense of the film, between evocation of the past and a present – yet necessarily retrospective – vision.

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