2 juin 2015
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Coline Ferrant, « L'alimentation dans la ville : inégalités, cohabitation, action publique locale », Dépôt Universitaire de Mémoires Après Soutenance, ID : 10670/1.2be62a
Ce mémoire porte sur l'inscription urbaine des pratiques alimentaires. Il articule une approche métropolitaine des inégalités, et une approche localisée et compréhensive des inégalités, de la cohabitation entre groupes sociaux et de l'action publique locale. La première est une analyse spatiale, sur Paris et la petite couronne. La deuxième est une ethnographie urbaine en contexte de diversité ethno-raciale et de classe, dans le quartier de la Goutte d'Or (XVIIIe arrondissement de Paris). À Paris et en petite couronne, les effets de quartier sur les pratiques alimentaires consistent en l'accentuation de la différenciation sociale de ces pratiques. L'enquête à la Goutte d'Or permet de préciser que ces effets de quartier forment un éclectisme alimentaire (des pratiques obéissant à des logiques de distinction variées), lequel distingue les couches supérieures des classes populaires, les immigrés et établis de longue date, et ceux attachés au quartier et intégrés à ses réseaux de sociabilité. Ces groupes sociaux diffèrent aussi quant à leurs usages stratégiques de l'espace. Les classes populaires précaires cherchent à diversifier leurs lieux de ressources. Les classes populaires stables mobilisent l'offre de la Goutte d'Or, mais aussi d'autres commerces des espaces populaires de Paris et de sa banlieue. Les classes moyennes et les classes supérieures veulent s'approvisionner dans le quartier, mais l'offre y est incompatible avec leurs pratiques : leur mobilité pour achats se restreint au XVIIIe arrondissement. Cette différenciation des pratiques au niveau local nourrit des pratiques d'évitement et des jeux de distinction entre les groupes sociaux. De plus, les styles de vie des classes populaires immigrées, ostentatoires dans l'espace public, freinent le processus de gentrification. Mais les classes moyennes et les classes supérieures non-immigrées, majoritaires dans les dispositifs participatifs, orientent l'action publique sur l'alimentation dans le sens de leurs souhaits. Celle-ci favorise alors l'installation de commerces conformes aux pratiques des classes moyennes et classes supérieures non-immigrées et aiguise les perceptions de la gentrification par les acteurs (institutionnels, associatifs, commerçants, habitants, usagers).