2011
Cairn
Pascal Griset, « Du « temps réel » aux premiers réseaux : une entreprise rêvée, une informatique à l'épreuve du quotidien (des années 1960 au milieu des années 1970) », Entreprises et histoire, ID : 10670/1.2xspv5
Née à la fin de la Seconde Guerre mondiale, l’informatique commence à trouver sa place dans les entreprises à partir de la fin des années 1950 pour y occuper progressivement la position centrale qu’elle y occupe actuellement. Cet article aborde la première période d’adoption de l’informatique par les entreprises à travers une approche centrée sur l’adoption des nouvelles technologies. Il souligne particulièrement l’importance du « Temps réel », son impact sur le rapport des employés au traitement de l’information, sur leur formation et sur la manière dont les décideurs pensent la place du traitement de l’information dans l’entreprise. L’adoption de l’ordinateur pose autant de questions qu’elle en résout. Elle implique de repenser la circulation de l’information dans l’entreprise et entre l’entreprise et le monde extérieur. Très rapidement l’homme apparaît comme le point faible de ce nouveau dispositif que l’on rêve totalement fluide. Il est cependant incontournable et l’informatique implique des ajustements nombreux, parfois difficiles et générateurs de désillusion. Les technologies que l’on imagine pour limiter les effets du « maillon faible » sont pour la plupart décevantes, comme l’exemple de la lecture optique le souligne. Les interrogations sur le rôle que peut avoir l’informatique et sur sa capacité réelle à répondre aux attentes, souvent floues, que l’on place en elle caractérisent cette période. Ces doutes ne sont cependant pas suffisants pour empêcher la construction de deux convictions étayées par les premières réussites : l’entreprise « intégrée » ne se fera pas sans l’ordinateur ; l’ordinateur ne pourra contribuer à cette réussite qu’à la seule condition de fonctionner en réseau. Ainsi, dès le début des années 1970, c’est une logique de flux qui s’impose. Elle prend chair dans des constructions parfois improbables qui sont autant de proto-réseaux informatiques, improvisés et encore peu performants. Elle s’affirme comme l’axe fort d’une convergence, parfois chaotique, et toujours incertaine, qui se fraye un passage étroit entre espoirs déçus dans l’informatique et contribution concrète à la modernisation des entreprises françaises.