2021
Cairn
Jean-François Pérouse, « Le « logement social » en Turquie depuis le début des années 2000 : méprises conceptuelles, redéfinition des systèmes d’acteurs et invisibilisation des nécessiteux », NAQD, ID : 10670/1.3dj7za
Pays désormais massivement urbanisé (et même, d’une certaine manière, métropolisé de force), pays où l’accession à la propriété est l’horizon ultime de toute politique publique de logement, la Turquie n’a pas de politique publique de logement social clairement identifiable. Souvent confondu avec le logement collectif, le logement social n’existe pas comme une catégorie stable de l’action publique, pas plus au niveau de l’Etat qu’au niveau des pouvoirs locaux. Ce constat opéré, il s’agira de voir comment la catégorie « logement social » est manipulée et détournée à des fins partisanes et comment la vision de l’espace social s’en trouve faussée, privilégiant – pour fonder la politique publique de logement – les affiliations politiques et les relations de dépendance au détriment des critères socio-économiques plus objectifs. Autrement dit, alors que les populations les plus nécessiteuses sont invisibilisées et dès lors cantonnées dans l’autoproduction et le bricolage au jour le jour, les politiques publiques de « logement social », tout en étant des instruments d’ingénierie sociale (au service d’une conception conservatrice de l’ordre social), servent soit à récompenser des fidèles, soit à maintenir dans une dépendance totale des groupes sociaux aspirant à accéder à la propriété. Les endettés reconnaissants et les familles de şehit ont évincé les pauvres.