14 décembre 2020
Open Access , http://purl.org/eprint/accessRights/OpenAccess
Drujon D'Astros Caecilia, « Three essays on silences in management accounting : an exploratory research into power, talk and knowledge in management accounting in light of the exercice of silence », Theses.fr, ID : 10670/1.5h0roj
Cette thèse a pour objectif de montrer qu’en parallèle de la transparence, la comptabilité de gestion produit aussi du silence et peut être utilisée, fonctionner autour du silence. La comptabilité de gestion est une invitation à dire qui coexiste avec la dimension politique de la vie organisationnelle. Cette politique organisationnelle peut entraîner une forme de silence. La comptabilité de gestion peut, elle, être une partie intégrante de ce travail politique, à tous les niveaux de l’organisation, et être ainsi un outil important dans la création, et la perpétuation du silence. Dans la production, la consommation, l’analyse et le travail continuel de façonnage des chiffres, les acteurs organisationnels peuvent choisir, ou être forcés d’exclure des informations sensibles ou complexes. Lorsqu’une information de comptabilité de gestion est considérée comme difficile à lire, ou à comprendre, difficile à partager ou communiquer, non-satisfaisante ou insensée, elle peut être infusée, imprégnée d’une forme de silence. Ce silence ne se limite pas aux règles élémentaires de conversation, mais peut porter des messages et des stratégies qui modifient la réalité organisationnelle. Ce travail de recherche explore donc l’exercice du silence comme partie essentielle des systèmes de contrôle de gestion (Cooper et al., 1981). Ces pratiques de comptabilité de gestion contribuent à la construction de la réalité en orientant la motivation d’agir, en transmettant des normes de conduite, en engageant les usagers. Le silence, est une forme de gouvernement qui 152peut être essentielle à ces pratiques du contrôle et de la comptabilité, et qui peut s’exercer à la fois à travers un pouvoir autoritaire et à travers la force suggestive des outils de comptabilité de gestion. Chaque forme d’expression, dans les interactions ou dans les outils, crée du sens mais exclue aussi du sens et invite des silences, participe de la construction d’un espace du non-dicible. Cette thèse étudie la mise sous silence sous l’angle de dynamiques d’exclusion, du langage, des espaces de communication, du savoir. Cette exclusion est le jeu de tous les acteurs de l’organisation, aspirant à sauvegarder une diversité de domaines de pouvoir, d’expertise ou de savoir. Cette thèse interroge donc comment les pratiques de comptabilité de gestion créent, maintiennent ou brisent les silences dans les organisations ? Afin d’y répondre, j’utilise une méthode qualitative inductive (Chapman, Hopwood, Shields, 2006). Six mois d’étude ont été conduits dans une organisation publique à visée sociale. La thèse est organisée autour de trois articles de recherche. Le premier article interroge l’usage du silence pour asseoir et maintenir le contrôle. Le deuxième article analyse les limites de l’usage des outils de contrôle et comptabilité de gestion pour encourager l’expression et les discussions. Le troisième article étudie le silence comme mode de résistance à la surveillance. Cette thèse envisage ainsi différentes possibilités offertes par l’étude du silence pour enrichir notre connaissance et notre compréhension de la parole, du savoir et des luttes de pouvoir dans et au travers de la comptabilité de gestion. Ce faisant, ce travail propose des contributions aux littérature sur le contrôle de gestion, la conversation comptable, le pouvoir et la résistance.