2016
Cairn
Pierre Gros, « L’évergétisme édilitaire au temps de la seconde sophistique : le cas d’Éphèse », Revue archéologique, ID : 10670/1.7tberd
Les récents progrès réalisés dans la connaissance de l’aménagement monumental des grandes villes d’Asie Mineure entre les époques flavienne et antonine, ainsi que l’approfondissement de la recherche sur l’origine et la situation de leurs évergètes conduisent à poser la question, rarement abordée dans son détail architectural et urbanistique, du rôle joué par les représentants les plus fortunés de la Seconde Sophistique dans ces opérations de prestige. Les enjeux de pouvoir liés à ce genre d’action, et les disponibilités financières énormes dont disposaient certains de ces personnages les ont souvent incités à prendre une part active dans le choix et l’ornementation de beaucoup d’édifices, avec des succès divers. Philostrate laissait entrevoir le phénomène, mais les données archéologiques et épigraphiques en autorisent aujourd’hui, sur plusieurs sites, une évaluation plus précise. La ville d’Éphèse, capitale de la province d’Asie mais, autant que nous puissions le savoir, jamais admise dans le club très fermé du Panhellénion fondé par Hadrien, est, dans ce contexte, intéressante à plus d’un titre : l’observation des étapes de son enrichissement architectural entre la fin du i er s. et la majeure partie du ii e, et une réflexion sur la nature très singulière des monuments publics alors refaits ou construits dans le cadre de programmes dont la nécessité n’est pas toujours évidente, permettent de mesurer, mieux qu’ailleurs, les efforts d’une communauté cosmopolite pour exalter, à travers l’action de quelques‑uns de ses « intellectuels » les plus éminents, qui s’allient volontiers avec les notables les plus fortunés, tout à la fois son allégeance au pouvoir impérial, l’ancienneté de sa fondation et, plus que tout, la profondeur de son hellénisme. Compte tenu de la continuité des actions entreprises dans ce cadre et de la cohérence des projets dont elles procèdent, l’attitude de la classe dirigeante de cette magnifique cité apparaît à bien des égards véritablement pathétique.