De la chrétienté romaine à la Réforme en Dauphiné. Évêques, fidèles et déviants (vers 1340-vers 1350)

Abstract Fr

Terre de fractures au temps de la Réforme, le Dauphiné recèle pour la période précédente des sources nombreuses, propices à une évaluation d'ensemble de l'héritage religieux médiéval. Les plus anciennement reconnues privilégient la perception d'une crise profonde en fonction de l'existence de précoces chasses aux sorcières au XVe siècle et de poursuites permanentes, depuis les années 1330 jusqu'à la croisade de 1488, contre les communautés haut-dauphinoises se réclamant du message de Valdès dans leur condamnation de l'Église hiérarchique au nom de l'idéal évangélique. Il est tentant dès lors de verser d'emblée le dossier dauphinois parmi les pièces à charge du procès de l'Église médiévale. En fait, l'abondance et la variété des informations relatives à l'oeuvre épiscopale sur la longue durée dans les diocèses de Grenoble et d'Embrun, ainsi que ce qui est perceptible de la réponse du milieu, conduisent à une vue moins monolithique de la situation : les générations qui précèdent la Réforme n'ont pas été ici, et quelle que soit la modestie évidente du domaine considéré, une période d'abandon paresseux à laquelle seule une minorité de dissidents aurait échappé. Deux conceptions possibles et bien vivantes de la vie de foi apparaissent, fondées sur des sensibilités différentes, aux racines également vigoureuses : l'une privilégiant la lecture linéaire du message, l'autre exaltant la légitimité des conceptions catholiques et les choix de dévotions qui en découlent. C'est là la source de violences extrêmes dans le présent et pour le futur, celle d'autant de promesses de fidélité à la tradition rénovée que de certitude de rupture définitive avec elle.