L'imaginaire musical et la peinture en France entre 1791 et 1863 : mythes, pratiques et discours The musical imaginary and painting in France between 1791 and 1863 : myths, expressions and discourses Fr En

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Durant une large première moitié du dix-neuvième siècle, la musique est érigée en modèle poétique et esthétique. Elle met les artistes au défi d’un idéal invisible, impalpable et éphémère. Du Sommeil d’Endymion de Girodet à la Jeune fille en blanc de Whistler, cette étude tente de comprendre l’origine, les raisons, ainsi que les modalités du dialogue qui s’est opéré, en France, entre un imaginaire sonore revivifié et le domaine pictural. Elle s’attache à en dégager les mythes fondateurs et les expressions concrètes au sein des œuvres, des pratiques et des discours. De Sainte Cécile au poète civilisateur et au musicien virtuose, l’art des sons est incarné par des figures inspirées ou possédées qui contribuent à modeler une nouvelle image de l’artiste. À mesure qu’elle s’affirme comme un phare au sein des Beaux-arts, la musique offre, de plus, des arguments originaux, en faveur d’une régulation ou, au contraire, d’une subversion des pratiques. Les modes d’appropriation qui naissent de ce nouveau paragone révèlent deux grandes tendances. Dès le début des années 1790, plusieurs artistes comme Valenciennes, David, Girodet ou encore Prud’hon s’emparent d’un idéal sonore mythique pour fonder une veine lyrique. Celle-ci se caractérise par des sujets sentimentaux, un essor du paysage, un culte voué à la manière vaporeuse du Corrège ou encore par la représentation de drames intériorisés. Une autre forme de musicalité picturale s’épanouit à partir des années 1820. Elle se traduit par une valorisation de la main du peintre, envisagée selon un rapport d’imitation et de rivalité avec celle du musicien. De Vernet à Ingres et à Delacroix, la “signature” de l’artiste s’exprime sur la toile, par le degré de fini de ses interprétations ou sa manière « symphonique » d’agencer les formes et les couleurs, indépendamment des contingences mimétiques. Absorbées, dès les années 1860, dans le giron baudelairien et wagnérien, cette passion artistique et les musicalités spéculatives qu’elle a générée semblent offrir, une fois mise au jour, un nouveau prisme pour ré-explorer le romantisme pictural et son historiographie.

Throughout the first half of the 19th century, broadly-defined, music is instituted as a poetic and aesthetic model. Artists are challenged by its invisible, impalpable and ephemeral ideal. From The Sleep of Endymion by Girodet to The White Girl by Whistler, this thesis focuses on understanding the origins, the rationale as well as the different aspects of the dialogue that took place in France between a revivified musical imaginary and the field of painting. It aims at extracting its founding myths and its concrete manifestations in works, expressions, and discourses. From Saint Cecilia to the civilising poet to the musical virtuoso, the art of sounds is personified by inspirited or captivated figures who contribute to model a new image of the artist. Moreover, as it gradually becomes considered as a guiding light for the Fine arts, music offers original arguments in favour of regulating or, alternatively, subverting artistic techniques. The different modes of appropriation rising from this new paragone unveil two main tendencies. As early as the beginning of the 1790s, several artists like Valenciennes, David, Girodet or Prud'hon use a mythical ideal of music to lay the foundations for their lyricism. This lyricism is characterised by sentimental subject matters, an increase in landscape productions, a passion for Correggio’s misty manner or the representation of inner dramas. Another form of pictorial musicality arises from the 1820s onwards. It materialises through a positive re-evaluation of the painter's hand, either in emulation of or as a rival to the musician's. From Vernet to Ingres to Delacroix, the degree of finish of the artist’s interpretations or his “symphonic” manner to arrange shapes and colours, regardless of mimetic contingencies, express his “signature” on the canvas. Absorbed from the 1860s by the followers of Baudelaire and Wagner, this artistic passion and the speculative musicalities it generated seem to offer, once put to light, a new avenue to explore pictorial Romanticism and its historiography.

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