2013
Cairn
Patrick Charaudeau, « L'arme cinglante de l'ironie et de la raillerie dans le débat présidentiel de 2012 », Langage et société, ID : 10670/1.c3ln2x
Dans les débats politiques, les actes humoristiques ne sont pas de mises, sauf dans des émissions de télévision − lesdits talk shows d’infotainment − qui s’y prêtent en en faisant leur raison d’être. Mais le débat politique est un genre marqué au coin du sérieux qui en son fondement ne s’y prête pas, et encore moins quand il s’agit d’un débat en face à face avec la solennité de l’enjeu présidentiel. Cependant, on sait qu’en même temps chacun des débatteurs est là pour gagner, et gagner auprès d’un public qui attend de voir lequel va l’emporter sur l’autre. Pour ce faire, chacun doit faire assaut de stratégies argumentatives, mais comme les débatteurs savent que celles-ci ne sont pas toujours probantes, ils tentent d’atteindre le contradicteur à coups de flèches empoisonnées. Or, parmi les différents procédés humoristiques, l’ironie et le sarcasme (ou la raillerie) sont ceux qui se prêtent le mieux à la stratégie de disqualification de l’adversaire dont le but est de le délégitimer et de lui ôter tout crédit. Dans le débat de 2012, les deux candidats ne se sont pas privés d’user d’ironies et de sarcasmes. La forte tension qui a présidé aux échanges entre les deux candidats explique que ceux-ci se soient « lâchés » de temps en temps. Mais il est intéressant d’observer que la manière dont chacun s’y est pris est révélatrice de leurs différences et permet de dire lequel des deux s’en sort le mieux en termes d’image.