25 avril 2020
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Gannier Odile, « Marges de tolérance : pourparlers aux frontières de l’Intangible et du Négociable », Loxias-Colloques - Collection d'actes de colloques du CTEL, ID : 10670/1.c8at3f
La tolérance peut se définir comme l’« État d’esprit de quelqu’un ouvert à autrui et admettant des manières de penser et d’agir différentes des siennes » (cnrtl), qui suppose l’acceptation de ce que l’on pourrait éventuellement empêcher ; c’est-à-dire comme une qualité positive (ou passive). Or l’étymologie du mot renvoie plutôt à l’endurance, qui suppose que l’on accepte une gêne, un poids : ainsi – au lieu de s’ouvrir généreusement à l’autre – on consent à prendre sur soi, à supporter de voir son propre domaine envahi, ses convictions bafouées, ses certitudes ébranlées, son confort menacé. On peut émettre l’hypothèse qu’il en va ainsi des opinions d’autrui : elles ne sont acceptables que dans la mesure où elles ne remettent pas fondamentalement en cause les siennes propres. De la sorte, la tolérance connaît sa ligne de frontière entre ce qui est négociable (où les pertes sont négligeables) et l’intangible, qui constitue le noyau dur des convictions personnelles ou communautaires. La tolérance cesse lorsque l’on se place en situation de défense de sa propre forteresse investie (avec ses valeurs individuelles ou collectives). Il peut en aller ainsi de la réaction du voyageur surpris par l’altérité : il « tolère » tant que son intégrité n’est pas menacée. On pourra s’appuyer dans un premier temps sur l’opposition entre Thevet et Léry tous deux outre-atlantique vers 1550, face à un peuple de Tupinambas un peu cannibales…