Adorno et l’utopie : retours et détours

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Le titre de cet article suggère un rapprochement entre Theodor W. Adorno et l’utopie – une association qui est susceptible de rencontrer quelques oppositions. Néanmoins, l’utopisme joue un rôle central dans la critique sociale chez Adorno, bien qu’il puisse être opposé à toute concrétisation normative d’un futur social utopique. Afin de démontrer l’importance de l’utopie dans l’œuvre d’Adorno, la discussion fera référence à plusieurs passages ou périodes de sa pensée, et notamment ses réflexions critiques basées sur les travaux de Walter Benjamin, Thorstein Veblen, Oswald Spengler, et Aldous Huxley. Je choisis pour épigraphe un extrait de La dialectique de la raison : « Ce qui est en cause, ce n’est pas la conservation du passé, mais le rachat [ Einlösung] des espérances du passé »1. C’est un extrait que je partage volontiers avec un autre auteur, dont les efforts pour refaçonner l’élément nostalgique et utopique chez Adorno méritent d’être réexaminés.

The essay argues that, despite many objections this claim may stir, utopian thinking plays a central role in Theodor W. Adorno's social critique. To make the case, one can draw on many passages in Adorno's works at different times, and especially on his critical engagements with Walter Benjamin, Thorstein Veblen, Oswald Spengler, and Aldous Huxley. Adorno offers two utopian visions: the first a “chronotope” in which the possibility of change is revived, an indeterminate time and place for action; the second an image of utopia achieved, from which all human cares have disappeared. It is suggested that these two visions, which one would expect to be teleologically linked, cannot exist on one experiential continuum. The difficulty, perhaps impossibility, of bringing them together is a particularly revealing index of the practical deficit in Adorno's thinking.

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