À propos de « super-vieillissement ». Idéalisation, hypomanie, renoncement

Résumé Fr En

La psychologie clinique du vieillissement permet de dresser un tableau du grand âge bien plus contrasté que celui proposé par les tenants de l’idéologie du super-vieillissement. Deux cas cliniques, celui d’un centenaire très sthénique résidant en institution et celui d’une femme hyperactive d’un peu plus de 50 ans, permettent d’aborder le sens du maintien à tout prix de la performance dans le vieillissement. Si l’existence de potentialités humaines sortant de l’ordinaire, support de toutes les convoitises et de tous les fantasmes de généralisation, n’est pas rejetée, l’exigence de l’endurance et de l’exceptionnel, si souvent portée par les médias, vient questionner le fonctionnement psychique de ceux qui se l’approprient au-delà d’une certaine dose où le raisonnable se fait porteur d’élan. L’idéalisation de la performance, l’arrogance de l’exception, le mépris de la différence et du handicap, le déni de la perte et du manque, une tentative de défense contre une dépressivité consécutive aux altérations et un refus de la mort ressortent comme des motifs communs de cette identification individuelle au super-vieillissement.

The clinical psychology of aging provides a far more contrasting picture of old age than that proposed by proponents of the ideology of super-aging. Two clinical cases, one of a very dynamic centenarian living in an institution and one of a hyperactive woman a little over fifty years old, allow us to discuss the meaning of maintaining performance at all costs during the aging process. While we do not reject the existence of extraordinary human potentialities—which give rise to yearning and widespread fantasy—the requirement of perseverance and the unprecedented, so often projected by the media, raises questions about the psychic functioning of those who appropriate it beyond a certain dose where the reasonable becomes the bearer of momentum. The idealization of performance, the arrogance of exception, the contempt for difference and disability, the denial of loss and lack, an attempt to defend oneself against depressiveness resulting from changes, and a refusal of death emerge as common reasons for this individual identification with super-aging.