Le navire immobile : mobilité d'un topos scientifique de Copernic à Casanova

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Dans son De Revolutionibus orbium cœlestium, Copernic s’appuie sur un vers de Virgile pour comparer l’illusion cosmologique dont nous sommes quotidiennement victimes à celle d’un navigateur qui croirait le rivage en mouvement. Bien que l’analogie n’ait en aucune façon force de preuve, elle devient vite un lieu commun de la littérature copernicienne, que l’on retrouve chez Bruno, Képler ou Galilée, et même, selon un autre mode, dans l’autobiographie de Casanova. En examinant diverses manifestations de ce topos – dont l’origine remonte à la science grecque –, on s’aperçoit qu’il constitue un lieu privilégié de réélaboration stratégique, de reformulation créative en vertu d’une culture rhétorique commune à ce que nous appellerions aujourd’hui l’écriture scientifique et l’écriture littéraire. Mais l’analyse du topos révèle encore deux choses : d’abord, que l’hypallage présente dans le vers de Virgile livre en quelque sorte la structure rhétorique de l’intuition copernicienne ; ensuite, que son extrême plasticité, et donc la relativité de ses usages, prolonge à la perfection son contenu scientifique, qui se ramène à une leçon de relativité optique ou mécanique.

The Motionless Nave : the Variability of a Scientific Topos, from Copernicus to CasanovaIn his De Revolutionibus orbium cœlestiu, Copernicus uses a line from Virgil to compare the cosmological illusion we are daily victim to, to that of a sailor thinking the coast was moving. Even though this analogy does not in any way stand in for a proof, it rapidly became a topos of Copernican literature, found under the pen of Bruno, Kepler, or Galileo, and even, in another genre, in Casanova’s autobiography. In analysing different manifestations of this topos – whose origins are in Greek science – one realises that it gives shape to a privileged locus for the strategic re-elaboration, or creative reformulation, in respect of the common rhetorical culture, of what we would now call scientific and literary writing. But the topos’ analysis reveals yet two more issues : first, that the transferred epithet in Virgil’s line reveals as it were the rhetorical structure of the Copernican intuition ; secondly, that its plasticity, in its very exaggeration showing the relativity of its use, is the perfect illustration of its scientific content, which ultimately is about relativity in optics or mechanics.

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