2017
Cairn
Gisèle Venet, « « Ce n’est plus thym ny marjolaine » As You Like It, ou l’atelier de la réécriture », Études anglaises, ID : 10670/1.enwayc
Pour écrire As You Like It, Shakespeare pratique plus que jamais le plagiat, au même titre qu’un Montaigne qui écrit de « larcins » mais en fait un miel qui « n’est plus thym ni marjolaine ». L’intrigue et les personnages de la comédie proviennent jusque dans des détails infimes d’un roman de Thomas Lodge, Rosalynde or, Euphues’ Golden Legacy, célèbre à juste titre avec ses récits en méandres déterminés par le seul hasard et sa psychologie des profondeurs où l’on découvre le mal au bien mêlé. Lodge, lui-même, connu pour ses plagiats, dont nombre des poèmes qu’il incorpore à son roman, emprunte une longue ballade en vers du xive siècle, The Tale of Gamelyn, dont il fait le corps de son récit. Shakespeare garde tout du récit et des personnages, avec parfois un art de la litote inattendu là où Lodge était prolixe. Surtout, il mêle à ces personnages de roman deux personnages de théâtre, le bouffon Touchstone et le mélancolique Jaques, qui, sur le mode parodique, pourraient être chargés d’écrire entre les lignes un « art poétique », montrant un Shakespeare peu enclin à suivre les préceptes d’Horace, absorbé qu’il est par la poétique d’Ovide.