Un débat en coulisses : Trumbo, Kubrick et la dimension historique de Spartacus, 1960

Fiche du document

Date

2006

Discipline
Type de document
Périmètre
Langue
Identifiant
Collection

Cairn.info

Organisation

Cairn

Licence

Cairn


Sujets proches En

Enslaved persons

Citer ce document

Natalie Zemon Davis, « Un débat en coulisses : Trumbo, Kubrick et la dimension historique de Spartacus, 1960 », Actes de la recherche en sciences sociales, ID : 10670/1.eod3g6


Métriques


Partage / Export

Résumé Fr En

Certains metteurs en scène de cinéma choisissent de tourner des films historiques poussés par leur intérêt réel à représenter et comprendre le passé, même s’ils n’ont pas toujours le sens exact du recours aux sources historiques. Les archives de Dalton Trumbo, scénariste du Spartacus tourné en 1960 par Stanley Kubrick en offrent un exemple éclairant. Pendant le tournage de Spartacus, Trumbo écrivit aux producteurs, aux acteurs et surtout au jeune réalisateur, Stanley Kubrick, évaluant les reprises de scènes et contestant les coupures effectuées dans son scénario. Ses objections étaient formulées parfois sous formes d’idées universelles : « le commun des esclaves haïssait l’esclavage », et la révolte se devait donc d’avoir « une qualité morale et héroïque ». Des critères d’historicité retenaient souvent plus particulièrement son attention : le contraste existant entre les patriciens romains et les esclaves sur le plan des mœurs sexuelles et de la vie familiale ; le caractère et la portée de la révolte des esclaves et sa signification pour l’histoire politique de la République. Kubrick s’affronta à lui à ce propos, mu tantôt par une sensibilité politique différente, tantôt par une interprétation divergente des événements historiques et des acteurs qui y étaient en jeu. Ainsi, Kubrick souhaitait humaniser son héros et ses compagnons et rejeta la proposition de Trumbo d’introduire dans le film une cérémonie de mariage collective. Et, surtout, Kubrick supprima un passage du dialogue qui suggérait que cette révolte avait conduit non à une défaite mais à une victoire puisqu’elle avait entraîné la chute de la République ; il considérait au contraire que la défaite de l’armée des esclaves et la crucifixion de Spartacus étaient des tragédies et devaient continuer à être considérées comme telles. Le film, dans sa version finale, réunit les points de vue historiques des deux hommes.

Filmmakers sometimes turn to historical films with a genuine interest in understanding and representing the historical past, if not always with much sense for how to get and evaluate historical evidence. The archives of Dalton Trumbo, scenarist for the 1960 film Spartacus, are a rich example. As Spartacus was being shot, Trumbo was writing letters to the producers, actors, and especially to the director, the young Stanley Kubrick, evaluating the scenes and objecting to departures made from his scenario. Sometimes his objections were informed by universalistic ideas: “all normal slaves hated slavery” and thus the uprising must have “a moral and heroic quality”. Often his concerns were precisely historical: the contrasting sexual mores and family life of the Roman patricians and of the slaves; the character and breadth of the slave revolt and its significance for the political history of the late Roman Republic. Here Kubrick took issue with him, sometimes moved by a different political sensibility, sometimes by a different understanding of historical actors and events. Thus Kubrick wanted to humanize the heroic Spartacus and his followers and rejected Trumbo’s proposal for a scene of slave mass-marriage. Especially Kubrick cut dialogue that suggested that the unsuccessful revolt had been a victory because it had led to the downfall of the Roman Republic. He considered that the defeat of the slave army and the crucifixion of Spartacus was tragic and had to be left that way. The final film combines historical perspectives from both men.

document thumbnail

Par les mêmes auteurs

Sur les mêmes sujets

Sur les mêmes disciplines

Exporter en