2017
Cairn
Catherine Le Galès et al., « Poursuivre, avec une maladie d’Alzheimer, une vie qui a de la valeur : La valeur de la vie dans l’approche par les capabilités », Revue française d'éthique appliquée, ID : 10670/1.hh05m4
Nous présentons l’évaluation de la vie humaine proposée par l’approche par les capabilités. Celle-ci, initialement développée par l’économiste Amartya Sen, est fondée sur une triple reconnaissance, d’abord celle de la diversité des êtres humains, ensuite celle que la disponibilité de ressources ne suffit pas, à elle seule, à garantir la capacité réelle d’agir ou le « bien vivre » des personnes, enfin, celle de la nécessité de trouver des solutions pratiques pour rendre la société moins injuste à l’égard de ceux qui, pour différentes raisons, sont dans des situations de désavantage considérées collectivement comme devant faire l’objet d’une action correctrice.Nous insistons sur la conceptualisation que défend l’approche par les capabilités de ce qu’est une « bonne vie », à savoir un cours de vie auquel on attache de la valeur, conforme à ses souhaits, et donc sur ce qui différencie cette approche des méthodes générales d’évaluation et notamment de celles développées par les économistes utilitaristes, au premier rang desquelles se trouvent les méthodes orientées vers la mesure quantifiée des moyens.Puis, à partir d’une recherche portant sur les personnes atteintes d’une maladie d’Alzheimer ou d’un trouble apparenté, nous détaillons les déplacements méthodologiques que suppose la mobilisation de l’approche par les capabilités. Celle-ci demande la construction d’une base informationnelle la plus large possible car orientée sur ce qui, dans les façons de faire et d’être observées ou rapportées par les personnes directement et indirectement concernées, résulte d’un choix qu’elles valorisent, ou est présenté comme ayant une valeur particulière, en d’autres termes sur ce qui compte pour elles et donc leurs aspirations et leurs finalités. Nous mettons plus particulièrement en exergue l’importance du regard en arrière pour donner, dans ces situations particulières, une valeur à la vie du présent. Nous discutons ce résultat à la lumière de la confrontation proposée d’une vie humaine comprise comme un trésor ou comme un capital pour montrer les difficultés qu’il y aurait à catégoriser ce résultat dans l’une ou l’autre de ces deux conceptions considérées comme mutuellement exclusives, et le risque qu’il y aurait alors à négliger, de ce fait, la contribution spécifique de l’approche par les capabilités.