2020
Cairn
Yves Érard, « Trouver sa voix dans le paysage sonore d’une langue étrangère », A contrario, ID : 10670/1.im9edw
Cet article aborde le problème de la subjectivité de la voix dans l’apprentissage du français langue étrangère. Deux exemples d’apprentissage de la lecture à haute voix, en langue 1 puis en langue 2, montreront que mon expression dans une langue qui n’est pas la mienne ne consiste pas à m’approprier cette langue, mais à accepter de me laisser traverser par elle. L’expression de soi se tisse dans les expressions d’autrui. Je ne m’approprie donc pas une langue, c’est elle qui s’empare de moi. Puis-je supporter cette altération de mon expression par les mots des autres ? Cela dépendra de ma capacité à me rendre intelligible dans des rythmes et des musiques que je ne maîtrise pas encore. Cette intelligibilité sera fragile parce qu’elle impliquera toujours que je me reconnaisse moi et que je me fasse reconnaître dans un paysage sonore qui ne m’est pas encore bien familier. L’apprentissage d’une langue étrangère me demande un effort qui s’apparente à de la patience : vis-à-vis des autres, d’abord, vis-à-vis de moi-même, ensuite. Cette vision de la subjectivité dans une langue étrangère met en évidence que l’apprentissage d’une confiance en soi se construit symétriquement à l’apprentissage d’une confiance en autrui, d’une confiance en soi comme un autre.