2020
Cairn
Mark R. Anspach, « Apprivoiser la violence. Le sacrifice, la vengeance, le don », Revue du MAUSS, ID : 10670/1.js6itu
René Girard caractérise le sacrifice comme « une violence sans risque de vengeance ». Il faut préciser : sans risque de vengeance interne. Cette définition ne se limite pas au sacrifice proprement dit, elle englobe une série de rites qui fournissent un exutoire à la violence tout en l’empêchant de se propager au sein du groupe. La vengeance externe est « sacrificielle » en ce qu’elle canalise la violence vers le dehors. Les échanges agonistiques décrits par Marcel Mauss marquent une nouvelle étape : si la rivalité entre groupes donne à la violence un débouché extérieur, l’échange agonistique confère à cette rivalité une forme qui évite la violence ouverte. Refuser de donner, c’est risquer d’être victime de violence soi-même. Nous soutenons que l’objet donné fonctionne comme une victime de rechange, un substitut sacrificiel sur lequel la violence est détournée. Cette hypothèse jette une nouvelle lumière sur certains détails du potlatch relevés par Mauss.