5 février 2021
Open Access , http://purl.org/eprint/accessRights/OpenAccess
Gabriele Fedozzi, « Construire l'invisible : convergences et analogies entre les arts visuels et les sciences expérimentales », Theses.fr, ID : 10670/1.kmk0vg
Il est généralement admis de considérer l’art et la science comme deux domaines nettement séparés dans leur méthode de production des images et dans leur apport de connaissance spécifique. Il est ainsi apparu pertinent de repérer les convergences et les analogies qui peuvent conduire à des points de contact notamment dans le domaine de l’invisible, où il est moins aisé d’élaborer des modèles scientifiques aptes à visualiser la forme réelle des objets étudiés. Les théories se fondant sur la ressemblance (de la source par rapport à la cible), dans les arts visuels aussi bien que dans les sciences expérimentales, ne semblent pas pouvoir rendre compte de la complexité de la représentation et de sa fonction référentielle (Goodman). D’autres conceptions, comme celle de Hughes et celle de Suarez, sont proposées car elles permettent de réunir les deux domaines sous un même mode de fonctionnement de l’image qui se base sur la théorie inférentielle. Les caractéristiques essentielles qui déterminent l’image scientifique, telles que l’abstraction et l’idéalisation (Chakravartty), sont comparées aux traits distinctifs de l’image artistique en suggérant l’idée qu’il y a convergence vers un même principe régulateur de sélection et d’organisation des données visuelles ou informationnelles. Pour confirmer qu’il peut exister une étroite corrélation entre art et science, il est apparu nécessaire de trouver un modèle scientifique qui possède une origine artistique. La genèse d’un des modèles couramment utilisés dans le domaine de la microbiologie a été reconstituée en montrant que son origine artistique a contribué de manière déterminante à la codification des données instrumentales afin de permettre la visualisation des protéines (modèle en ruban). Alors que l’image scientifique vise un idéal d’objectivité et de neutralité, elle est néanmoins soumise à un processus d’esthétisation qui se retrouve dans les revues de vulgarisation scientifique, dans les concours de photographie allant jusqu’à inclure la diffusion d’images des agences spatiales comme l’ESA et la NASA. L’idéal de beauté qui émerge est relié à la notion de merveilleux, notamment pour la micrographie, et au concept de sublime pour l’image astronomique. De surcroît, deux artistes sont convoqués pour témoigner de l’intérêt du milieu artistique pour la science et révèlent deux approches opposées : Corbasson adopte une interprétation libre des images et des notions scientifiques pour composer ses œuvres, alors que Taverna produit des compositions picturales qui mettent en images les concepts scientifiques et qui ont pour ambition de répondre aux questionnements de la science.