2005
Cairn
Cristina Ion, « Vivre et écrire la politique chez Machiavel : le paradigme du ritratto », Archives de Philosophie, ID : 10670/1.kmn06y
Le lien entre l’expérience acquise par Machiavel au service de la République florentine (1498-1512) et l’œuvre politique écrite après son éloignement forcé des affaires est explicite. Tous les commentateurs se sont attachés à déceler, dans la correspondance diplomatique et les écrits mineurs ante res perditas, les thèmes qui réapparaîtront de manière aboutie dans les textes majeurs de Machiavel. Cependant, le passage de la pratique à la « théorie » n’est pas immédiat. Le ritratto, composé d’extraits d’expérience regroupés autour d’une question particulière, permet une problématisation originale de l’histoire présente et s’inscrit dans l’écart qui se creuse, tout au long de l’activité diplomatique de Machiavel, entre la politique florentine qu’il est censé servir et sa propre vision des choses. Aussi le traité du Prince se fonde-t-il, non sur une réalité brute, mais sur une expérience déjà disposée dans un certain nombre de ritratti. Un immense effort pour rationaliser la politique à partir du particulier est ainsi entrepris par Machiavel, sans pour autant sacrifier ce qui précisément déclenche cette entreprise et la rend interminable, à savoir, l’irréductibilité de la fortune.