2002
Cairn
Guy Brunet et al., « Vers une insertion sociale ? le mariage des enfants abandonnés à Lyon au XIXe siècle », Annales de démographie historique, ID : 10670/1.lxxa2l
L'intégration sociale des anciens enfants abandonnés devenus adultes n'a fait l'objet que de très rares études. Dans cet article, nous abordons cette question à travers l'accès au mariage qui est une condition indispensable pour fonder une famille légitime La ville de Lyon recevait chaque année, au milieu du xix e siècle, un millier d'enfants abandonnés, voire plus. Parmi ceux qui parvenaient à l'âge adulte, peu prenaient un jour un conjoint légitime dans cette même ville : dans les deux périodes étudiées (1872-1874 et 1891-1893) 688 mariages concernent au moins un ancien enfant des hospices. Grâce à la construction d'un échantillon témoin, il est possible de mettre en évidence quelques caractéristiques spécifiques témoignant de cette difficile insertion. L'accès au mariage est plus fréquent pour les filles de l'Assistance que pour les garçons, mais, pour tous, le mariage est célébré à un âge tardif. Les anciens enfants abandonnés, qui ont très majoritairement un statut professionnel médiocre, épousent presque tous des conjoints issus de familles légitimes, mais ceux-ci appartiennent aux classes les plus populaires, sont souvent des ruraux installés en ville depuis peu, et se marient eux-mêmes plus tardivement que les autres époux lyonnais. Les actes de mariage font aussi apparaître deux autres caractéristiques des unions impliquant un enfant abandonné : une pratique largement répandue du concubinage et la fréquente légitimation d'enfants naturels. Ces faits peuvent confirmer la difficulté rencontrée par les anciens enfants des hos-pices, en particulier les jeunes femmes, pour concrétiser une union légale. Lorsque l'insertion sociale par le mariage est possible, elle se réalise au terme d'un parcours difficile et au sein des strates les plus défavorisées de la population lyonnaise.