Le Crime sans nom : Dire l’inceste dans la société française du xixe siècle (1791-1898)

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2016

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Fabienne Giuliani, « Le Crime sans nom : Dire l’inceste dans la société française du xixe siècle (1791-1898) », Sociétés & Représentations, ID : 10670/1.nxt3cb


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Avec l’inceste, la question du dicible, compris dans un premier temps comme ce que la société autorise à dire puis, dans un deuxième, de ce que la société est capable d’entendre, permet tout particulièrement de comprendre la construction des procédés normatifs à l’œuvre dans la société française du xixe siècle.Décriminalisé en 1791, l’inceste est objet de débats jusqu’aux années 1830. Si le mot choque parfois, il se scande, il s’utilise et il s’entend dans l’ensemble de la société. Mais autour de la constitution du Code pénal de 1832, les discours et les représentations se transforment. Ce changement est d’abord le fait des élites qui préfèrent désormais suggérer l’inceste, plutôt que de le dire. La création du scandale de l’inceste couplée à la peur de la classe ouvrière naissante entraînent la formation d’une nouvelle morale qui s’impose ensuite à l’ensemble du corps social. Ce dernier, autour des années 1880, n’est plus à même d’accepter d’entendre le crime. Un siècle après sa décriminalisation, les représentations du crime ont donc été profondément retravaillées dans l’ensemble de la société ce qu’une étude croisée des discours publics et de l’écriture privée permet de révéler.Porté par ce processus de mise au silence, le crime d’inceste perd son nom à la fin du xixe siècle, au profit de formules périphrastiques qui deviennent les seuls discours de vérité désormais acceptables. Dès lors, la constitution du tabou sur l’inceste a des conséquences importantes révélées par l’étude des mots prononcés par les individus appelés à témoigner du crime devant les autorités judiciaires. L’interdiction formelle du dire enferme inéluctablement dans un carcan toutes les paroles sur le crime dans le champ de l’indicible ce qui pose par effet-miroir deux problèmes essentiels à la judiciarisation et à la résolution du crime : celui de la parole des enfants, victime d’un crime désormais sans nom et qui ne peuvent espérer de réparation, et celui de la parole des agresseurs, frappés de monstruosité s’ils avouent ce crime devenu impossible.

The crime with no name: Incest telling in nineteenth French society (1791-1898)The telling of incest apprehended in this study both as, what society authorizes to tell and as, what society is capable of understanding, allows the historian to understand the standard upgrade process in Nineteenth French society.Decriminalized in 1791, incest has been discussed until the 1830’s. If the use of the word could be heard as an offend during that period, it was still used and heard by the entire society. Social imaginary and speeches about incest were eventually transformed with the elaboration of 1832 Penal Code and the new fear of the workink class. The French elite was the source of this transformation which slowly, by the end of the century, spread in the entire society. One century after its decriminalization, incest could not be told anymore : scandal and fear were from this point forward its two companions.In this historical process, the crime of incest lose its name, preferred by periphrastic formulas. This new taboo was particularly strong in the judiciary sphere where victims lose gradually their ability to pronounce the exact word of the crime they endured. This inaudible and untelling new crime of incest contributed to isolate further the victims and their agressors from the French society by the end of the century.

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