2020
Cairn
Bénédicte Milland-Bove, « « Godefroy et le mouvement des peuples ». Singulier et collectif dans l’écriture de la guerre (XIIe–XIIIe siècles) », Le Moyen Age, ID : 10670/1.o9h66s
Le modèle médiéval, épique ou romanesque, sert souvent de repoussoir aux écrivains modernes qui prétendent donner une vision moins idéalisée des conflits, en montrant les foules dans leur quotidien parfois terre-à-terre plutôt que l’individu héroïque. Dans sa Poétique du récit de guerre, Jean Kaempfer montre comment le récit de guerre moderne se construit en contraste avec l’ancien récit de bataille, mais le modèle qu’il envisage est avant tout le modèle antique du récit « à la César ». En faisant dialoguer images, récits et procédés de textes antiques, médiévaux et modernes voire contemporains, le présent article voudrait proposer des pistes pour intégrer les récits médiévaux des xiie- xiiie siècles à une poétique générale de la guerre. Celle-ci sera envisagée à travers une série de tensions (entre singulier et collectif, ordre et désordre, dicible et indicible, topique et invention) présentes à chaque époque plutôt que comme un mouvement vectorisé d’un type d’écriture à un autre. On fera ainsi l’hypothèse d’une écriture « continuée » ou « collective » de la guerre, avec une circulation intertextuelle et mémorielle des discours et motifs, entraînant une sorte de « guerre des récits », mais se nourrissant aussi de realia sans cesse réactivées.