11 mai 2020
info:eu-repo/semantics/OpenAccess
Harmonie Aubin et al., « Comment favoriser, chez les élèves, le développement d'une attitude réflexive sur la langue ? », Dépôt Universitaire de Mémoires Après Soutenance, ID : 10670/1.puxwyr
L'étude de la langue est plus que jamais au centre des préoccupations de l'enseignement du français, les nouveaux programmes de français au lycée (2019) en attestent. Pourtant, un autre consensus fait bloc : il s'agit d'un enseignement d'une grande complexité tant par l'intérêt modéré sinon limité que les élèves lui portent que par l'inquiétude qu'il suscite chez les enseignants. Une première intuition nous a poussé à nous demander si la solution ne résidait pas dans une possible ludification de cet enseignement. Mais la recherche en didactique est formelle : le problème n'est pas tant lié à l'habillage des activités proposées aux élèves qu'à un souci de transposition didactique. Il semblerait que les élèves n'expriment pas un manque d'intérêt pour le fonctionnement de leur langue maternelle mais plutôt une incompréhension des concepts étudiés en classe qu'ils ne rattachent pas à leur expérience intime et quotidienne de ladite langue. Alors, un questionnement de recherche s'est imposé à nous : comment favoriser, chez les élèves, le développement d'une attitude réflexive sur la langue ? Cette quête métalinguistique nous a menés aux Ateliers d'Antoine, les travaux de Lionel Audion (2015) à destination du premier degré nommés ainsi en hommage au linguiste Antoine Culioli. Séduits par une méthode qui amène les apprenants à extérioriser des opérations habituellement inconscientes dans la résolution de problèmes grammaticaux, nous nous sommes décidés à tenter de l'adapter pour le second degré. Nous avons alors conçu des fiches d'activité (accompagnées de leur leçon) et avons défini un protocole d'application de l'exercice en classe afin de venir stimuler la métacognition des élèves dans le cadre d'un travail porté sur la langue. Dans notre version des Ateliers d'Antoine, les élèves, répartis en groupes de trois ou quatre membres (groupes idéalement composés par l'enseignant lui-même) coopèrent, se confrontent et débattent afin d'élaborer eux-mêmes les règles grammaticales de la notion à l'étude à partir de leurs prérequis (identifiés par l'enseignant) et de l'observation d'énoncés soigneusement sélectionnés par le concepteur de la fiche d'activité. Ce travail en autonomie donne lieu à une mise en commun ritualisée où les débats peuvent se poursuivre et s'étendre d'un groupe à l'autre sous la direction du professeur qui, in fine, viendra institutionnaliser les savoirs. Notre travail propose une analyse qualitative de données prélevées, dans une classe de niveau sixième (enregistrements vocaux), durant les échanges entre pairs ou entre l'enseignant et les élèves. Nous avons cherché à identifier la présence (ou non) d'un travail métalinguistique émergeant des interactions des élèves dans la réalisation des activités des fiches ou de la stimulation du professeur avec les groupes d'élèves ou en classe entière. Les résultats de nos analyses sont particulièrement encourageants puisqu'ils témoignent de la présence massive d'un travail métalinguistique des apprenants. Les élèves cherchent des explications logiques aux problèmes grammaticaux qui leur sont posés en tentant de connecter leur savoir en langue aux faits qu'ils peuvent observer. Notre étude s'est également intéressée à la place de l'enseignant qui a un rôle à jouer dans l'exacerbation des débats linguistiques et dans la stimulation de la posture réflexive sur la langue. Notre recherche n'a pas valeur de prescription mais propose plutôt nos conseils, nos pistes et nos tâtonnements et se veut davantage un travail ouvert qui ne demande qu'à être saisi.