Le sexe unique, la norme du phallus et l’abjection de la femme chez Freud et Lacan

Résumé Fr En

Dans cet article, j’analyse la place que « la femme » occupe dans quelques extraits des œuvres de Freud et Lacan à partir du « modèle du sexe unique » proposé par Thomas Laqueur. Je suggère que la psychanalyse a eu du mal à abandonner le paradigme d’un seul sexe, en dépit de la centralité du rôle que la différence sexuelle paraît jouer dans sa théorie. Je propose de voir que l’importance donnée à l’élément phallique a parfois empêché la psychanalyse de penser d’autres formes de subjectivation dans lesquelles le phallus (anatomique ou symbolique) ne soit pas si central. À partir de la proposition d’une norme du phallus régnant dans la psychanalyse, les contributions de Julia Kristeva et Judith Butler sur l’abjection sont utilisées pour penser la fabrique du genre féminin comme antipode du phallique. Je soutiens qu’une subjectivation pensée par le manque du phallus maintient « la femme » dans une place de non-existence et, finalement, d’abjection.

In this article, the position granted to ‟the woman” in the works of Freud and Lacan is analysed along the line of the ‟one-sex model” suggested by Thomas Laqueur. The aim is to demonstrate how, in some excerpts of their theory, Freud and Lacan did not renounce the conception of the one-sex, despite the apparent centrality of the concept of sexual difference in their theorisations. I suggest that the importance given to the phallus prevents psychoanalysis from tackling other forms of subjectivation in which the phallus (anatomic or symbolic) is not so central for the subject. Under the reign of the phallic norm, the construction of the female gender as the antipode of the phallic norm maintains women in a position of non-existence and, ultimately, of abjection.