14 mars 2019
https://www.openedition.org/12554 , info:eu-repo/semantics/openAccess
Nelly Quemener, « Les contradictions corps/langage comme moteur du rire. Parodies et incarnations de genre chez les humoristes femmes en France », Presses Sorbonne Nouvelle, ID : 10670/1.r8rr9x
Cet article se penche sur les manières dont les humoristes femmes en France s’emparent de l’humour pour signaler les processus de catégorisation du genre. Florence Foresti et Julier Ferrier émergent dans les talk-shows entre 2004 et 2006 et se caractérisent par des jeux énonciatifs qui gouvernent l’impossible distinction entre humoriste et personnage et par le développement de ressorts du rire basés sur les contradictions entre les actes du corps (attitudes, gestuelles, mouvements) et les actes du langage qui qualifient ce corps (mots et séries de signifiants). Par le biais de personnages, elles expriment des subjectivités nouvelles caractérisées par des « troubles dans le genre », des « féminités masculines » et des « hyperféminités ». Florence Foresti et Julie Ferrier se distinguent pourtant par leur jeu scénique : chez Foresti, les interactions corps/langage sont le lieu d’une parodie permanente qui montre le genre telle une mascarade ; chez Ferrier, elles sont le moyen de l’incarnation parfaite d’un personnage dont elle ne désigne pas l’artificialité. Si les parodies de Foresti contiennent un fort pouvoir de dénaturalisation du lien sexe-genre, les personnages de Julie Ferrier, qui ne montrent pas la dimension performative du genre, imposent, par leur imperturbable présence, une multitude d’identités de genre, dont certaines très proches du masculin ou inintelligibles selon les catégories masculin/féminin.