Paul Souriau à l’école d’Émile Gallé : l’ornement entre rêverie et utilité

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2019

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Rossella Froissart, « Paul Souriau à l’école d’Émile Gallé : l’ornement entre rêverie et utilité », Nouvelle revue d’esthétique, ID : 10670/1.rdwv55


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Théoricien de l’art, Paul Souriau (1852-1926) a été l’une des figures éminentes des milieux intellectuels nancéens du tournant du xixe siècle. Dans ses ouvrages majeurs – L’Esthétique du mouvement (1889), La Suggestion (1893), L’Imagination de l’artiste (1901), La Beauté rationnelle (1904) –, il développe une conception qui doit autant aux esthétiques positivistes et à la « physiologie de l’esprit » de Bernheim qu’à l’œuvre de Gallé, ses deux illustres concitoyens. Souriau structure sa réflexion autour de la formation des images à partir des composantes simples que sont l’arabesque et la tâche, convaincu qu’elles traduisent la force vitale présente dans le mouvement et dans la lumière. À l’origine d’une « beauté d’expression », ces éléments ne sont pas un jeu vain de formes, puisqu’ils répondent à une « finalité physiologique et psychologique ». Mais c’est pour avoir rendu à l’utilité un rôle central que Souriau a été considéré comme le père d’une « esthétique fonctionnelle » fondée sur le rejet de l’ornement. Cette lecture ne résiste pas à l’examen de La Beauté rationnelle, ouvrage qui doit être compris comme partie d’une esthétique qui reste très fortement attachée aux idéaux morrisiens de valorisation de l’artisanat et à l’ornement rationaliste et organiciste défendu par Gallé. S’il y a une forme de beauté – la « beauté mécanique » – produite par la parfaite convenance d’une forme à sa fin, celle-ci déborde largement la stricte utilité, et contribue, avec la « beauté d’expression », à enrichir notre quotidien de stimulations visuelles. Le renversement de la hiérarchie traditionnelle des arts – « beaux-arts » vs « arts appliqués » – s’opère donc à la conjonction de « beauté d’expression » et « beauté mécanique » et comporte l’idée d’une nécessaire réception socialisée des arts.Rêverie esthétique et utilité, loin de former un couple antinomique, deviennent alors les deux termes d’un nouveau rapport à l’objet d’art, intégré à l’univers réenchanté des perceptions, dans sa dimension physiologique, matérielle et technique.

The theorist Paul Souriau (1852-1926) was a leading figure in intellectual circles in Nancy at the turn of the 19th century. In his essays on L’esthétique du mouvement (1889), La suggestion (1893), L’imagination de l’artiste (1901) and La beauté rationnelle (1904) he developed original thinking linked with both Hippolyte Bernheim’s “physiology of mind” and the artwork of Emile Gallé. Souriau studied the emergence of images through their most basic components : the arabesque and the coloured mark. He believed that they convey the vital strength present in movement and light. These elements are not an aimless play of patterns, since they are the origin of a “beauty of expression”, that corresponds to a “physiological and psychological finality”.Souriau is best known as the father of a “functionalist aesthetic” based on the rejection of ornament. This interpretation of La Beauté rationnelle is partly inaccurate : actually his work is closely linked to the crafts ideals of William Morris, and to rationalist and organicist ornament promoted by Emile Gallé. If there is a kind of beauty – “mechanical beauty” – which is the result of the perfect correlation of form and function, this beauty greatly surpasses strict utility and contributes, together with “beauty of expression”, to the enrichment of our daily lives through visual stimulation. The inversion of the traditional hierarchy – “fine arts” vs “crafts” – is achieved by combining “beauty of expression” and “mechanical beauty”, and thereby evoking the idea of social art.For Souriau aesthetic reverie and utility are not contradictory : they become the two terms associated with a new relationship with artwork, integrated into the modern world of perceptions, in its physiological, material and technical aspect.

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